- La recherche sur la fertilité se heurte à la rareté des embryons humains
- Ces travaux pourraient permettre de mieux étudier les stades du développement de l'embryon pour éviter les fausse-couches et améliorer les techniques de fécondation in-vitro
La création de la vie humaine en laboratoire s'éloigne un peu plus du registre de la science-fiction. Quelques semaines après une expérience qui a permis de faire se développer jusqu'à 20 jours un embryon hybride humain-singe à partir de cellules souches, des scientifiques d'Exeter en Grande-Bretagne annoncent être parvenus à recréer, eux aussi à partir de cellules-souches, la structure précoce de l'embryon humain. Ces travaux ont été publiés dans la revue Cell Stem Cell.
De quoi s"agit-il ? En laboratoire, l'organisation en grappes de cellules souches humaines (des cellules qui ont la capacité de se transformer en différents types de cellules, NDLR) et l'introduction de deux molécules influençant leur développement a abouti à ce que 80% des grappes constituent au bout de trois jours de culture une structure quasi-identique au stade blastocyste d'un embryon. Ce stade est celui d'une structure embryonnaire naturelle six jours après la fécondation, juste après la division de l'ovule fécondé. Et il a été observé que le blastocyste ainsi créé possédait les mêmes gène actifs qu'un embryon naturel, ce qui laisse supposer que la poursuite de son évolution serait possible.
Des travaux qui posent des questions éthiques
Pourquoi cette expérience a-t-elle été menée ? Les travaux qui visent à reproduire en laboratoire le processus de création de la vie humaine posent bien évidemment de vraies questions éthiques. Mais dans le même temps, les scientifiques continuent de s'interroger sur la façon dont se déroulent ces premières phases de la constitution d'un embryon. Et les recherches permettant d'avancer dans ce domaine se heurtent au fait que très peu d'embryons humains sont disponibles pour de telles études, ce qui fait que celles-ci sont souvent réalisées à partir de modèle murins (les souris, NDLR). Mais le système reproducteur de ces animaux est assez diffèrent de celui des humains.
D'où cette expérience qui, selon le Pr Austin Smith de l'université d'Exeter, "ouvre des possibilités intéressantes pour en apprendre davantage sur l'embryon humain".
Un outil de recherche sur l'infertilité
A quoi ces travaux peuvent-ils servir ? "Notre nouvelle technique fournit pour la première fois un système fiable pour étudier le développement précoce chez l'homme sans utiliser d'embryon; cela ne devrait pas être considéré comme une volonté de produire des bébés en laboratoires, mais plutôt comme un outil de recherche important qui pourrait profiter aux études sur les fécondations in-vitro et l'infertilité", rassure le Dr Guo de l'Institut des systèmes vivants de l'université d'Exeter. Au Royaume-Uni, un couple sur sept rencontre des difficultés pour concevoir un enfant.
D'ailleurs, l'étape suivante annoncée par les chercheurs devrait permettre, en laissant ces blastocystes se développer plusieurs jours supplémentaires, d'étudier la période qu'ils qualifient de "critique" où l'embryon s'implante dans l'utérus. C'est en effet à ce stade que de nombreux embryons ne se développent pas correctement. Une meilleure connaissance de ce qui se joue à cet instant pourrait ainsi éclairer sur les conditions nécessaires pour éviter les fausses couches.