Pourquoi Docteur – À partir de quel seuil de particules fines doit-on s’inquiéter pour notre santé ?
Matthieu Lecuyer – Aujourd’hui, tous les types de particules fines apparaissent dangereux pour la santé. On parle beaucoup de PM 2.5, qui est celle que l’on mesure le mieux. Le reste est difficile à quantifier car nous n’avons pas nécessairement les appareils qu’il faut pour calculer l’intensité des particules de manière massive dans les grandes villes. Il y a par exemple les nanoparticules, les plus nocives, qui sont tellement fines qu’elles rentrent dans les poumons ou le système sanguin et peuvent causer des dégâts irréversibles. Il faut éviter un maximum de les laisser pénétrer dans l’organisme. Le problème est que nous ne sommes pas suffisamment équipés en appareils de mesure pour connaître leur présence exacte.
Plus d’un enfant sur deux dans les grandes villes souffre, ou va souffrir plus tard dans sa vie, de problèmes respiratoires. On commence à peine à en trouver la cause et la plupart du temps, il apparaît que cela est lié à la pollution. De nombreuses personnes se demandent pourquoi elles ont beaucoup de glaires, la gorge qui brûle ou encore des maux de tête, mais tout ça est souvent la conséquence des particules fines. Celles-ci vont jusqu’à causer des arrêts cardiaques, qui sont aujourd’hui la première cause de mortalité liée à la pollution.
- Pourquoi est-ce que le risque pour la santé augmente avec la pratique d’une activité physique ?
Quand on est en plein effort, on respire jusqu’à 15 fois plus d’oxygène que lorsque l’on est statique, en terrasse par exemple. L’organisme est en manque constant d’oxygène, donc les alvéoles pulmonaires sont plus réceptives à inspirer de l’air pour le corps. C’est à ce moment-là que le danger augmente, parce que les particules fines pénètrent encore plus facilement dans les poumons. On a donc 15 fois plus de chances d’avoir des lésions suite à un effort dans un environnement pollué. Faire du sport en ville est désormais plus dangereux pour la santé que de ne pas en faire.
- Y a-t-il des activités qui sont plus dangereuses que d’autres ?
Toutes les activités nécessitent du cardio, donc que ce soit de la course ou du vélo, les pratiquants font face au même danger. Aujourd’hui, on encourage les gens à pratiquer du vélo dans les grandes villes mais les cyclistes sont exposés à des niveaux de pollution extrême à cause de la circulation.
Pour les sportifs de haut niveau, l’impact de la pollution sur leur santé est énorme. Plus vous êtes entrainés et votre organisme est challengé, plus les effets de la pollution seront importants. Un sportif doit faire attention à ce qu’il mange, à ce qu’il boit mais également à ce qu’il respire. D’ici quelques temps, je suis persuadé qu’on les verra courir avec des masques spécifiques pour alimenter leur corps d’une énergie pure s’ils veulent continuer à s’entraîner en ville, sinon il faudra aller ailleurs. Les grands stades se trouvent aujourd’hui à côté des portes du périphérique à Paris et l’on voit tous les jours des jeunes s’y entraîner. Il y a une vraie prise de conscience à avoir. La qualité de l’air, c’est dix fois plus de morts que la Covid-19 aujourd’hui.
- Comment faire pour limiter le risque si l'on se trouve en ville ?
On peut d’abord conseiller aux personnes de se renseigner sur la qualité de l’air et d’adapter leur activité en fonction des pics de pollution. Des applications de mobiles existent et prennent en compte différents paramètres comme la météo et l’hydrométrie pour calculer et anticiper les futurs pics. Il faut également s’écarter au maximum des sites pollués. Des heat maps sont disponibles en ligne pour savoir où ils se trouvent. Il faut éviter de faire du sport à côté des aéroports par exemple, la qualité de l’air y est très mauvaise. Il faut également que chacun se responsabilise et consomme moins. On est tous responsable de la pollution de l’air. Il faut éduquer et que chacun réduise sa consommation générale pour faire en sorte que la qualité de l’air soit la meilleure pour tout le monde.
Enfin, nous développons un masque qui permet d’optimiser les performances face à la pollution. Il permet de filtrer les particules très fines (jusqu’à 40 nanomètres), tout en permettant de laisser l’air rentrer très facilement. Il y a très peu de résistance respiratoire parce que l’effort nécessite peu de résistance et du confort. C’est une innovation mondiale.
- Pratiquer du sport en intérieur dans une ville polluée, est-ce dangereux ?
Cela dépend de plusieurs choses. Il est très important d’aérer mais s’il on se trouve à côté d’un axe routier, cela fait rentrer les particules fines. Mais le risque est plus faible qu’en extérieur puisque les composés organiques en intérieur sont moins fins et moins nocifs. Si l’on pratique du sport en intérieur et qu’après l’entraînement, on a la gorge qui gratte ou un petit goût amer, cela signifie que l’air n’est pas bon. Le recul aujourd’hui est difficile à avoir, car très peu de salles ont un système de tracking de la qualité de l’air. Les écoles commencent à utiliser des purificateurs d’air qui captent la qualité de l’air ambiante. L’important est toujours d’aérer un maximum.