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Déclin cognitif

Démence : le tabagisme enfume aussi le cerveau

Par Charlotte Arce

Il existe un lien entre démence, tabagisme et maladies cardiovasculaires, avec des différences entre femmes et hommes. Explications.

Marco Catullo/iStock
Menée auprès de plus de 70 000 volontaires de 18 à 85 ans, l'étude montre que le tabagisme et les maladies cardiovasculaires sont des facteurs de risque de démence.
Toutefois, les effets du tabagisme sur la santé neurologique sont plus prononcés chez les femmes et ceux des maladies cardiovasculaires chez les hommes.
Outre le risque aggravé de développer la maladie d'Alzheimer, le tabagisme et les maladies cardiovasculaires augmentent aussi le risque de contributions vasculaires à la déficience cognitive et à la démence (VCID), qui affectent la mémoire, la pensée et le comportement.

Selon les derniers chiffres de Santé Publique France, 30,4 % des personnes âgées de 18 à 75 ans fumaient du tabac en 2018, soit plus de 10 millions de personnes. Parmi eux, figuraient 34,6 % d’hommes et 26,5 % de femmes. Preuve que, malgré les 75 000 décès qu’il occasionne chaque année, le tabagisme est encore d’usage courant en France.

Si de nombreuses études pointent le risque de cancer, de maladies cardiovasculaires et respiratoires occasionnés par le tabac, fumer n’est pas non plus sans risque pour la santé neurologique.

C’est ce que met en lumière une vaste étude menée sur les associations entre le tabagisme et les maladies cardiovasculaires sur la fonction cognitive par des chercheurs du Translational Genomics Research Institute (TGen), une filiale de City of Hope (Californie). Publiés dans la revue Scientific Reports, ces nouveaux travaux montrent que le tabagisme et les maladies cardiovasculaire altèrent tous deux la capacité d'apprentissage et de mémorisation. Il existe toutefois une différence entre femmes et hommes : chez les premières, ce sont les effets du tabagisme qui sont les plus prégnants, tandis que les hommes sont plus affectés par les maladies cardiovasculaires.

Des différences marquées entre les sexes

Matt Huentelman, professeur de neurogénomique au TGen et auteur principal, ces résultats sont importants car ils suggèrent "que le tabagisme et les maladies cardiovasculaires ont un impact sur l'apprentissage verbal et la mémoire tout au long de l'âge adulte, dès l'âge de 18 ans".

Outre la maladie d'Alzheimer, la cause la plus importante de déclin cognitif est connue sous le nom de "contributions vasculaires à la déficience cognitive et à la démence" ou VCID, qui résulte d'un accident vasculaire cérébral et d'autres lésions cérébrales vasculaires qui entraînent des modifications importantes de la mémoire, de la pensée et du comportement. Selon cette étude, il est évident que le tabagisme et les maladies cardiovasculaires exacerbent le VCID.

Pour établir ce lien, les chercheurs du TGen ont analysé les données portant sur plus de 70 000 sujets vivant dans le monde entier, et âgés de 18 à 85 ans. Outre le fait qu’il s’agit d’une des rares études à évaluer les effets des maladies cardiovasculaires sur la fonction cognitive chez les jeunes adultes, elle est aussi l’une des seuls à "mettre en évidence certaines différences imprévues mais importantes entre les sexes en matière de déclin cognitif", explique Brian Tiep, directeur de la réadaptation pulmonaire et du sevrage tabagique à City of Hope. "L'impact sur l'acuité mentale semble progressif dans le temps - certains plus rapides que d'autres. Les habitudes de vie liées à l'alimentation, à l'exercice et au tabagisme sont certainement conséquentes et peuvent différer entre les hommes et les femmes. Les personnes soignées pour un cancer peuvent être affectées sur le plan cognitif par le cancer et son traitement", souligne-t-il.

Arrêter de fumer pour rester en bonne santé

Toutefois, les raisons de ces effets de modification du sexe ne sont pas entièrement comprises, admettent les chercheurs. Les résultats soulignent cependant "l'importance de prendre en compte le sexe biologique dans l'étude des contributions vasculaires aux troubles cognitifs et à la démence", estime Candace Lewis, co-autrice principale des travaux.

"Cette étude confirme l'importance de maintenir une bonne santé cardiovasculaire et d'arrêter de fumer, non seulement pour soutenir les soins du cancer, mais aussi pour améliorer les fonctions cérébrales", conclut le Dr Tiep.