- Le Comité national d'éthique revient sur la décision du gouvernement d'ouvrir la vaccination aux 12-18 ans à compter du 15 juin prochain et regrette que cette décision ait été prise sans attendre ses conclusions.
- Il souligne notamment que le "bénéfice individuel" que les adolescents tireront de la vaccination est faible et craint une "stigmatisation" de ceux ne souhaitant pas se faire vacciner.
- Il estime aussi que cette ouverture vaccinale en pleine décrue de l'épidémie n'est pas nécessairement opportune, et plaide pour "un suivi de pharmacovigilance sur le moyen et long terme chez les adolescents vaccinés".
"Y a-t-il une urgence absolue à commencer la vaccination dès maintenant, alors que plusieurs indicateurs sont au vert et que la rentrée scolaire de septembre pourrait signer le début de la campagne ?"
Dans un communiqué daté du 9 juin, le Comité national d'éthique (CCNE), pour mission de donner des avis sur les problèmes éthiques et les questions de société, a émis des réserves sur l’ouverture prochaine de la vaccination aux adolescents. Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé le 2 juin au 20 Heures de TF1 que les 12-18 seraient éligibles dès le 15 juin, l’organe consultatif regrette que "les décisions aient été prises si rapidement", avant même qu’il ne puisse rendre son avis.
Un bénéfice individuel "limité pour la santé physique" chez les ados
Dans son avis rendu hier, le CCNE souligne bien l’importance de la vaccination, indispensable pour endiguer l’épidémie de Covid-19. Il rappelle cependant que "les formes graves de l’infection sont très rares chez les moins de 18 ans", et qu’en conséquence, "le bénéfice individuel tiré de la vaccination" est "limité pour la santé physique".
Toutefois, rappelle le comité, "les conséquences de la pandémie sur la santé psychologique et mentale des enfants, et surtout des adolescents, sont profondes et probablement durables". Leur ouvrir la vaccination permettra de souligner "qu’ils ont pleinement participé à l’effort collectif destiné à protéger leurs aînés et les plus fragiles d’entre nous", et aidera à atteindre l’immunité collective. Objectif qui "ne pourra être atteint que par la seule vaccination des adultes".
Un risque de stigmatisation des ados non vaccinés
Subsistent néanmoins des questions, que posent explicitement le CCNE. "Est-il éthique de faire porter aux mineurs la responsabilité, en termes de bénéfice collectif, du refus de la vaccination (ou de la difficulté d’y accéder) d'une partie de la population adulte ? N’y a-t-il pas une sorte d’incitation à la vaccination pour retrouver liberté et retour à la vie normale ?", s’interroge-t-il. Car si la vaccination des adolescents se fera "sur la base du volontariat et avec l’accord des parents", le "risque de stigmatisation" des jeunes ne souhaitant pas y avoir recours est grand, estime l’organe consultatif. "Ne risque-t-on pas de briser leur confiance si le retour à la vie normale était compromis par l’arrivée de nouveaux variants ?"
Enfin, rappelle le CCNE, la question du calendrier dicté par le gouvernement se pose. "Y a-t -il une urgence absolue à commencer la vaccination dès maintenant, alors que plusieurs indicateurs sont au vert et que la rentrée scolaire de septembre pourrait signer le début de la campagne ?" Il préconise donc un "un suivi de pharmacovigilance sur le moyen et long terme chez les adolescents vaccinés", et conseille "que la stratégie 'Tester, tracer, isoler' soit optimisée chez les mineurs afin qu’elle soit éventuellement envisagée comme une stratégie alternative à la vaccination".