- Contrairement à ce que suggéraient de précédents travaux, notre microbiote intestinal n'est pas seulement influencé par des facteurs environnementaux, comme l'alimentation ou la prise de médicaments. 97 % des caractéristiques de notre microbiote sont en réalité héréditaires.
- Cette héritabilité des caractéristiques du microbiote a été possible grâce l'observation de babouins sauvages pendant 14 ans. C'est en étudiant sur ce temps long le microbiote des primates que les chercheurs se sont aperçus que la richesse et la variété des bactéries intestinales avaient un caractère héréditaire.
Quelles sont les origines de la composition de notre microbiote intestinal ? De nombreux travaux scientifiques se sont penchés précédemment sur cette question, et en ont conclu que la richesse bactérienne qui peuple nos intestins est principalement influencée par notre mode de vie. Notre alimentation, mais aussi les médicaments que nous ingérons ont un impact sur la qualité et la richesse de notre microbiote qui, en cas de déséquilibre, peut occasionner l’apparition de pathologies comme le diabète, l’obésité, les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin ou encore le cancer colorectal.
Mais une nouvelle étude menée par l’université de Notre-Dame (États-Unis) remet en question cette conception environnementale du microbiote intestinal. Publiée dans la revue Science, elle montre que plusieurs caractéristiques du microbiote intestinal sont héréditaires.
Une étude menée pendant 14 ans sur des babouins
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont examiné plus de 16 000 profils de microbiote intestinal recueillis sur 14 ans auprès d'une population de babouins étudiée depuis longtemps dans le parc national d'Amboseli, au Kenya. Selon eux, plusieurs traits du microbiote héritables chez les babouins le sont aussi chez les humains.
"L'environnement joue un rôle plus important que les gènes dans la formation du microbiome, mais cette étude nous permet de passer de l'idée que les gènes jouent un rôle minime dans le microbiome à l'idée que les gènes jouent un rôle omniprésent, même s'il est minime", souligne Elizabeth Archie, professeure au département des sciences biologiques et chercheuse principale de l'étude.
Ce qui varie par rapport aux études précédentes est l’approche sur le temps long. Alors que tous les travaux antérieurs mesuraient les microbiotes à un moment donné, l’ééquipe de recherche a ici utilisé es échantillons fécaux provenant de 585 babouins sauvages d'Amboseli, avec généralement plus de 20 échantillons par animal. Ainsi, même si les profils microbiotiques des échantillons ont montré des variations dans le régime alimentaire des babouins en fonction de la saison, ils ont toutefois constaté que 97 % des caractéristiques du microbiote, y compris la diversité globale et l'abondance des microbes individuels, étaient significativement héritables. À titre de comparaison, le pourcentage d'héritabilité n’avait été estimé qu’à 5 % seulement lorsque les échantillons étaient analysés à partir d'un seul point dans le temps.
Une composition aussi héréditaire chez l’humain
Or, précisent les chercheurs, c’est justement ainsi qu’ont été réalisées la plupart des études sur le microbiote humain. "Cela suggère vraiment que chez l'humain, si les chercheurs n'ont pas trouvé l'héritabilité, c'est en partie parce qu'ils ne disposent pas d'une décennie et demie d'échantillons fécaux dans le congélateur et qu'ils n'ont pas toutes les informations initiales sur l'hôte dont ils ont besoin pour découvrir ces détails", affirme la Pr Archie.
La découverte du caractère héréditaire des gènes du microbiote intestinal ouvre désormais la voie à l'identification future de microbes façonnés par la génétique. À l'avenir, des thérapies pourraient être adaptées aux personnes en fonction de la composition génétique de leur microbiote intestinal.