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Neuroscience

Cerveau : avoir un bon auditeur évite le déclin cognitif

Par Jean-Guillaume Bayard

Avoir quelqu’un sur qui compter et qui prête une oreille attentive est associé à une plus grande résilience cognitive et permet de freiner le déclin cognitif qui peut conduire, notamment, à Alzheimer.

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La fonction cognitive des individus ayant une plus grande disponibilité d'une forme spécifique de soutien social est plus élevée par rapport à leur volume cérébral total.
Avoir un auditeur de confiance permet de réduire le décalage entre l'âge biologique et l'âge cognitif.

Les interactions sociales à l'âge adulte sont importantes pour éviter le déclin cognitif malgré le vieillissement cérébral ou les changements neuropathologiques. Le mieux est d’avoir un bon auditeur, une personne de confiance qui est capable d’écouter avec attention. Selon une étude parue le 16 août dans le JAMA Network Open, cela est associé à une plus grande résilience cognitive, c’est-à-dire la capacité du cerveau à fonctionner mieux que ce à quoi on pourrait s'attendre compte tenu du vieillissement physique ou des changements cérébraux liés à la maladie.

Un décalage entre âge biologique et âge cognitif

Les chercheurs pointent notamment vers Alzheimer, une maladie évolutive qui affecte principalement les personnes de plus de 65 ans et interfère avec la mémoire, le langage, la prise de décision et la capacité de vivre de manière autonome. Ils ajoutent que si la maladie affecte généralement une population plus âgée, les résultats de cette étude indiquent que les personnes de moins de 65 ans gagneraient à renforcer leur soutien social. Pour chaque unité de déclin du volume cérébral, les individus qui ont la quarantaine ou la cinquantaine avec une faible disponibilité d'auditeur ont un âge cognitif, différent de l’âge biologique, supérieur de quatre ans à ceux avec une disponibilité élevée d'auditeur. 

Ces quatre années peuvent être incroyablement précieuses, souligne Joel Salinas, auteur principal de l’étude et chercheur au département de neurologie de l’université de New York. Trop souvent, nous pensons à la manière de protéger la santé de notre cerveau lorsque nous sommes beaucoup plus âgés, après avoir déjà perdu beaucoup de temps des décennies auparavant pour développer et maintenir des habitudes saines pour le cerveau. Mais aujourd'hui, en ce moment, vous pouvez vous demander si vous avez vraiment quelqu'un de disponible pour vous écouter de manière positive, et demander la même chose à vos proches. Prendre cette action simple met en marche le processus pour que vous ayez finalement de meilleures chances de la santé cérébrale à long terme et de la meilleure qualité de vie que vous puissiez avoir.”

Une meilleure fonction cognitive

Pour leur étude, les scientifiques ont suivi une cohorte de 2 171 participants âgés en moyenne de 63 ans. Ils ont examiné la disponibilité d'interactions sociales de soutien, y compris l'écoute, de bons conseils, l'amour et l'affection, un contact suffisant avec les personnes dont ils sont proches et un soutien émotionnel. Leur résilience cognitive a été mesurée comme l'effet relatif du volume cérébral total sur la cognition globale, à l'aide d'IRM et d'évaluations neuropsychologiques. Des volumes cérébraux inférieurs ont tendance à être associés à une fonction cognitive inférieure, et dans cette étude, les chercheurs ont examiné l'effet modificateur des formes individuelles de soutien social sur la relation entre le volume cérébral et les performances cognitives.

Les résultats ont montré que la fonction cognitive des individus ayant une plus grande disponibilité d'une forme spécifique de soutien social est plus élevée par rapport à leur volume cérébral total. La forme clé de soutien social relevée est la disponibilité de l'auditeur et elle est fortement associée à une plus grande résilience cognitive. Les chercheurs notent qu'une étude plus approfondie des interactions sociales individuelles peut améliorer la compréhension des mécanismes biologiques qui lient les facteurs psychosociaux à la santé du cerveau.

Ajouter le soutien social aux questions sur les antécédents sociaux

Avec ces résultats, les chercheurs recommandent aux médecins d'envisager d'ajouter cette question à la partie standard des antécédents sociaux d'un entretien avec un patient. Il s’agirait de demander aux patients s'ils ont accès à quelqu'un sur qui ils peuvent compter pour les écouter lorsqu'ils ont besoin de parler. “La solitude est l'un des nombreux symptômes de la dépression et a d'autres implications pour la santé des patients, insiste Joel Salinas. Ce genre de questions sur les relations sociales et les sentiments de solitude d'une personne peuvent vous en dire beaucoup sur la situation sociale plus large d'un patient, sa santé future et comment il se porte vraiment en dehors de la clinique.”