- Chez les mères souffrant de diabète, le risque de malformations congénitales du tube neural sont importantes. En cause : le vieillissement prématuré du tissu neural.
- L'étude, menée sur des souris diabétiques, montre toutefois qu'il est possible de stopper ce vieillissement prématuré et donc limiter le risque de malformations en utilisant un médicament anticancéreux, la rapamycine.
En France, près de 1 million de femmes en âge d’accoucher souffrent de diabète, une maladie due au dérèglement du taux de glucose dans le sang. Même traité grâce à de l’insuline, le diabète peut être la source de malformations du fœtus, en particulier du tube neural : le tissu qui formera le cerveau et la moelle épinière ne se développe alors pas correctement, ce qui peut entraîner une fausse couche ou un handicap profond.
Mais jusqu’à présent, les chercheurs ignoraient tout des mécanismes impliqués dans ces malformations. Dans une étude publiée en juin dans la revue Science Advances, une équipe multidisciplinaire a mené des recherches sur des souris et en a conclu que le diabète occasionne le vieillissement prématuré du tissu neural, ce qui occasionne des malformations congénitales.
"Bien que le diabète soit une maladie généralement associée à une population plus âgée, l'épidémie moderne de diabète chez les jeunes est largement alimentée par l'obésité et l'inactivité. En même temps, de nombreuses maladies liées au vieillissement sont affectées par le diabète, et nous savons maintenant que l'hyperglycémie semble induire ou renforcer le vieillissement embryonnaire prématuré, explique le Dr Peixin Yang, du Centre de recherche sur les anomalies congénitales de l'école de médecine de l'université du Maryland (UMSOM). Pendant plusieurs décennies, notre hypothèse était que le vieillissement prématuré, connu sous le nom de sénescence, se produisait chez les fœtus des mères diabétiques et qu'il était, en partie, à l'origine de ces anomalies congénitales. Ce n'est que récemment que nous avons eu les outils et la technologie pour pouvoir vérifier notre hypothèse."
Un inversement du processus de vieillissement prématuré
Dans le cadre de leurs travaux, les chercheurs ont mené des travaux sur des souris génétiquement modifiées pour développer des mutations imitant le diabète. Ils ont alors constaté que le tissu du tube neural des souriceaux de 8 jours nés de mères diabétiques contenait des marqueurs de vieillissement prématuré. En revanche, ces marqueurs n'étaient pas présents chez les souriceaux de mères non diabétiques. Les chercheurs ont ensuite constaté que les cellules présentant des marqueurs de vieillissement prématuré sécrétaient une foule d'autres signaux chimiques qui provoquaient la mort des cellules voisines.
Les chercheurs ont ensuite traité les souriceaux issus de mères diabétiques avec de la rapamycine, un médicament anticancéreux connu pour empêcher les signaux chimiques toxiques d'être libérés par les cellules qui vieillissent prématurément. Ils ont alors constaté que les souriceaux traités à la rapamycine avaient des tubes neuraux entièrement formés, comme ceux des souriceaux nés de mères non diabétiques."Ce médicament a essentiellement permis aux cellules sénescentes de se comporter normalement", explique le Dr Yang.
L’espoir de thérapies ciblées pour prévenir les malformations congénitales
Si ces résultats suggèrent que des thérapies plus spécialisées pourraient être mises au point pour prévenir les fausses couches ou les anomalies congénitales chez les bébés nés de mères diabétiques, la rapamycine ne pourra pas être un traitement viable pour prévenir ces anomalies du tube neural. En effet, ce médicament affecte trop d'autres processus cellulaires et peut être toxique, de sorte qu'elle ne serait pas un traitement viable pour prévenir les anomalies du tube neural chez les nourrissons humains.
La prochaine étape des travaux de recherche consiste à voir si les malformations cardiaques et rénales constatées chez les fœtus nés de mères diabétiques sont causées par le même mécanisme de sénescence. "Si c'est le cas, cela suggérerait que nous pouvons développer un traitement unique plus spécialisé dans ces processus de développement pour prévenir ce spectre de malformations congénitales", conclut Dean Reece, co-auteur des travaux.