Même lorsqu’ils ne sont pas eux-mêmes victimes de maltraitance au sein de leur famille, les enfants exposés aux violences conjugales présentent un risque plus important de retard cognitif. Ces violences vont retentir sur l’ensemble de leur personnalité, sur leur organisation psychique et leur développement.
C’est la conclusion à laquelle est parvenue l’ancienne infirmière Linda Bullock. Dans une étude publiée dans a revue Maternal Child Health Journal, celle qui est aujourd’hui professeure émérite à la Sinclair School of Nursing de l'université du Missouri (États-Unis) s’est intéressé aux conséquences des violences conjugales sur le développement psychologique et cognitif des enfants.
Une étude des violences intrafamiliales
Le point de départ de ses travaux remonte aux années 1980, lorsqu’elle a remarqué des ecchymoses sur le corps d’une femme enceinte souffrant de travail prématuré qu’elle évaluait. Lorsqu’elle l’a interrogée sur l’origine de ses blessures, la femme lui a répondu que le réfrigérateur lui était tombé dessus alors qu’elle faisait le ménage.
"Quelque chose ne semblait pas normal, mais je ne savais pas quoi dire à ce moment-là. Je suis simplement passée à la question suivante de l'évaluation, se rappelle Linda Bullock. Nous avons arrêté le travail et l'avons renvoyée chez elle, mais je parie mon dernier dollar que je l'ai renvoyée dans une relation violente, et cela a éveillé mon intérêt pour aider d'autres infirmières à aider les femmes battues. Ce que nous ne savions pas à l'époque, c'était l'impact de la violence sur le bébé."
L’impact d’une figure paternelle violente
Instigatrice du programme DOVE Domestic Violence Enhanced Perinatal Home Visits) venant en aide aux femmes victimes de violence conjugale dans les zones rurales du Missouri, Linda Bullock a remarqué que de nombreuses femmes maltraitées avaient eu jusqu'à neuf partenaires romantiques différents pendant et après leur grossesse. Elle a donc souhaité examiner l'impact de la multiplicité des figures paternelles sur le développement cognitif des nouveau-nés.
Pour le savoir, elle a réalisé des tests de développement neurologique lors de visites à domicile trois, six et douze mois après la naissance Elle a alors constaté que les nourrissons des femmes qui n'avaient eu qu'un seul partenaire masculin qui les avait maltraitées avaient des résultats cognitifs moins bons que ceux des femmes ayant eu plusieurs partenaires masculins, dont certains seulement étaient violents.
D’autres travaux ont déjà montré par le passé que les enfants grandissant au sein d’un foyer violent avaient souvent de moins bons résultats scolaires en raison de retards de développement neurologique et étaient davantage exposés à divers problèmes de santé, notamment des troubles gastro-intestinaux, des difficultés à manger et à dormir, ainsi qu'au stress.
"Lorsque les infirmières se rendent à domicile pour surveiller les femmes enceintes et leurs bébés en développement, nous voulons qu'elles soient formées à reconnaître les signes avant-coureurs d'une éventuelle violence entre partenaires intimes, souligne la Pr Bullock. Je repense encore à 1983, lorsque j'ai renvoyé cette dame chez elle dans une situation terrible, et je suis passionnée par le fait de m'assurer que je peux aider les infirmières d'aujourd'hui à ne pas faire la même erreur que moi."