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Pas d'automédication

Grossesse et paracétamol : une vaste étude scientifique appelle à la prudence

Par Charlotte Arce

Selon une vaste étude internationale, la consommation de paracétamol pendant la grossesse pourrait entraîner des effets indésirables sur le développement du fœtus.

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Cette vaste méta-analyse confirme que la consommation de paracétamol pendant la grossesse pourrait altérer la santé reproductive et le développement neurologique du fœtus.
L’utilisation du paracétamol chez les femmes enceintes doit être réservée pour les cas de nécessité et toujours être précédée de l'avis d'un médecin ou d'un pharmacien.

Lorsqu’on est enceinte, il est fortement recommandé de ne pas consommer d’alcool, de faire attention à son alimentation et de ne pas pratiquer l’automédication. Même lorsqu’il s’agit de médicaments perçus comme inoffensifs comme le paracétamol.

C’est ce que met en lumière une nouvelle méta-étude internationale publiée jeudi 23 septembre dans la revue Nature Reviews Endocrinology. Selon ses 91 auteurs, experts dans différentes spécialités (neurologie, pédiatrie, gynécologie, endocrinologie, etc.), la consommation de paracétamol pendant la grossesse "pourrait altérer le développement du fœtus, ce qui pourrait augmenter les risques de certains troubles neurodéveloppementaux, reproductifs et urogénitaux". Ils recommandent donc une utilisation modérée du paracéramol, qui ne doit être utilisé par les patientes qu’après consultation de leur médecin.

Le paracétamol, pas toujours perçu comme un "vrai" médicament

Lorsque l’on est enceinte, le paracétamol est le seul analgésique à pouvoir être prescrit pour soulager les douleurs légères à modérées et la fièvre. Sur son site, l’Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) rappelle ainsi que "si nécessaire, le paracétamol peut être utilisé pendant la grossesse. Cependant il devra être utilisé à la dose efficace la plus faible, pendant la durée la plus courte possible et à la fréquence la plus réduite possible".

Or, a rappelé David M. Kristensen, l’un des auteurs de l’étude et professeur associé de biologie cellulaire et de physiologie à l’université de Copenhague (Danemark), "nombreuses sont celles à ne pas considérer le paracétamol comme un vrai médicament qui peut avoir de possibles effets secondaires".

Mais toute prise de médicament comporte des risques, rappelle cette étude, qui se base sur la littérature existante sur les liens entre les effets du paracétamol et l’enfant à naître entre le 1er janvier 1995 et le 25 octobre 2020. Seules les études investiguant directement l’exposition au paracétamol ont été retenues afin d’éviter que d’autres facteurs, tels que l’âge, la génétique ou la situation socio-économique ne faussent les résultats.

Des effets sur la fertilité et le système nerveux

Les scientifiques étudient depuis un certain temps l'impact potentiel du paracétamol sur le développement du fœtus. "Il y a maintenant un ensemble significatif de preuves qui suggèrent que le paracétamol perturbe le développement reproductif des animaux et des humains", explique la co-autrice Shanna Swan, professeure de médecine environnementale et de santé publique à la Icahn School of Medicine at Mount Sinai à New York.

Les risques connus sont ceux de testicules non descendus et un raccourcissement de la distance ano-génitale, "ce qui permet de prédire une diminution ultérieure du nombre de spermatozoïdes et une baisse de la fertilité", poursuit la chercheuse. "Nous constatons également une altération de la fonction ovarienne qui a des conséquences sur la fertilité ultérieure, bien que les femmes aient été moins étudiées."

Une consommation trop importante de paracétamol a aussi des effets sur le développement neurologique du futur enfant. "Les troubles identifiés étaient principalement le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention, ou TDAH, et les anomalies comportementales liées au TDAH, qui comprennent également les troubles du spectre autistique, les retards de langage, la diminution du QI et les troubles du comportement", détaille Ann Bauer, qui a aussi participé à l’étude.

Mieux informer les femmes enceintes sur les risques

Les auteurs notent cependant que la consommation à court terme - deux semaines ou moins - comportait le moins de risques pour le foetus. "C'est parmi les femmes qui déclarent avoir utilisé l'acétaminophène pendant une période plus longue - environ deux semaines ou plus de deux semaines pendant la grossesse - que l'on trouve les associations les plus fortes", explique le Pr Kristensen. Les auteurs estiment que "des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre les mécanismes et contrôler les autres expositions. Mais le fait est qu'il existe des preuves substantielles qui suggèrent qu'au minimum, il s'agit d'un danger pour le fœtus".

D’où la nécessité pour les professionnels de santé de mesurer les risques de la consommation de paracétamol chez les femmes enceintes, et de les prendre en compte en cas de prescription. Ils doivent aussi avertir les femmes enceintes de "renoncer à l'utilisation" du paracétamol pendant la grossesse "sauf si son utilisation est médicalement indiquée". Même après avoir obtenu l'approbation d'un médecin, les femmes doivent quant à elle "minimiser leur exposition en utilisant la dose efficace la plus faible pendant la durée la plus courte possible".