Cancer le plus fréquent chez l'homme de plus de 50 ans, le cancer de la prostate est le plus souvent traité par hormonothérapie. Mais la présence de certaines bactéries intestinales pourraient affaiblir l'efficacité de ce type de traitement, alerte une récente recherche publiée dans la revue Science. La cause ? De faibles niveaux d'androgènes chez les patients pouvant favoriser l'expansion des bactéries intestinales, qui se mettent alors à créer des hormones susceptibles d'entraîner la croissance du cancer de la prostate.
Ce lien entre rôle des bactéries et progression de ce type de cancer a été étudié par une équipe de chercheurs de l'Institut de recherche sur le cancer de Londres, de l'Institut de recherche en oncologie de Bellinzona (Suisse) et de l'École polytechnique fédérale de Zurich. Les scientifiques ont réalisé des tests sur des souris atteintes d'un cancer de la prostate et ont constaté que l'élimination de toutes les bactéries intestinales chez les rongeurs ralentissait la croissance de la tumeur et retardait l'apparition d'une résistance aux hormones.
L'étude a également démontré que la transplantation de matières fécales chez les souris atteintes d'un cancer de la prostate hormonorésistant chez des souris à faible taux d'androgènes qui n'avaient pas encore développé de résistance favorisait la croissance de la tumeur.
Manipuler le microbiome pour mieux traiter le cancer
Ces observations ont été ensuite été transposées à l'humain : les chercheurs ont analysé les bactéries intestinales de patients traités au Royal Marsden NHS Foundation Trust (Londres). Parmi les patients étudiés, 19 d'entre eux avaient un cancer de la prostate qui répondait encore à l'hormonothérapie, tandis que 55 présentaient une hormonorésistance avancée.
Les chercheurs ont incubé des mini-tumeurs appelées organoïdes, dérivées de patients atteints de cancer de la prostate, avec différentes bactéries intestinales et ont tenté de les traiter en laboratoire. Ils ont ainsi pu identifier les "empreintes" bactériennes favorables et défavorables liées à l'issue du cancer de la prostate, ce qui pourrait permettre d'identifier les hommes qui pourraient bénéficier de stratégies visant à manipuler le microbiome.
Les résultats, une fois validés en clinique, pourraient offrir de nouvelles possibilités de traitement du cancer de la prostate, estiment les scientifiques. "La prochaine étape consistera à explorer la manière dont nous appliquons ces signatures chez les patients. (...) À long terme, notre objectif serait de produire un "yaourt" enrichi en bactéries favorables afin de prévenir la résistance aux traitements", explique au site Medical Xpress, Johann de Bono, professeur de médecine expérimentale du cancer à l'Institut de recherche sur le cancer de Londres.