- Pourquoi Docteur : Vous apportez votre expertise sur le cancer du sein dans le premier livre digital consacré à cette maladie, « Cancer du sein, s’informer pour se soigner ». Pourquoi vous a-t-il semblé important de contribuer à l’existence de ce nouvel outil d’information ?
Pr Gilles Freyer : Cela a une fonction rassurante en pratique. Les sources d’information se multiplient aujourd’hui pour cette maladie complexe et en constante évolution et ce que l’on sent dans les dialogues avec les patientes ou lorsque l’on regarde les forums des associations de patientes, c’est quand même un certain désarroi face à travers les questions multiples que les personnes se posent. Et cela dans un moment où le temps médical est compté et où les consultations ne durent pas aussi longtemps que les personnes le souhaiteraient pour pouvoir poser toutes leurs questions. Par ailleurs, les patientes se documentent souvent sur internet, ce qui, dans mon expérience en tout cas, est plus souvent une source d’inquiétude que de ré-assurance. Ce que l’on attend d’une information, c’est qu’elle soit évidemment précise, complète, objective, mais aussi qu’elle rassure et non pas qu’elle inquiète ! Or je trouve que très souvent elles s’inquiètent et c’est là ma motivation principale.
- A quel moment de la maladie le fait de pouvoir s’informer est vraiment nécessaire ?
Pr G.F. : La principale caractéristique de l’information sur le cancer du sein, c’est qu’elle est complètement évolutive et qu’elle doit être réadaptée au cours du temps. Et c’est bien cela qui est difficile : les questions que les personnes se posent quand on fait un diagnostic, questions qui sont liées su stress du diagnostic, à l’inquiétude, à la souffrance, ne sont pas du tout les mêmes questions que celles que se pose la personne qui a terminé son traitement six mois après et qui commence à s’interroger sur la surveillance, le risque de rechute, pourquoi on fait ou non tel ou tel examen, sur éventuellement aussi -et c’est de plus en plus important aujourd’hui- le contexte familial, l’éventuelle prédisposition génétique. Donc il y a vraiment un besoin d’information pour tous les stades et tous les moments de la maladie. Et sur ces aspects-là, le temps médical ne peut pas, par définition le donner malgré l’évidente bonne volonté des soignants il y a toujours mille et une questions qui se posent et nous avons voulu essayer d’y apporter mille et une réponses.
- Ce premier livre digital sur un sujet de santé -et c’est une des grandes particularités de cette nouveauté en matière d’édition- sera réactualisé en permanence, à chaque avancée des connaissances dans cette maladie et sa prise en charge. Les choses changent à ce point rapidement dans le cancer du sein ?
Pr G.F. : Ces cinq à dix dernières années, on n’a jamais eu autant de modifications du panorama de prise en charge de cette maladie et il y a des traitements nouveaux dans à peu près tous les domaines. Cela évolue très rapidement, il ne se passe pas un an sans que tel ou tel nouveau traitement, qu’il s’agisse d’un traitement ciblé, d’une immunothérapie, ne vienne modifier nos pratiques. C’est aussi la raison pour laquelle je crois qu’il est bon que les patientes et leurs associations connaissent ces mouvements thérapeutiques parce que les difficultés financières qui existent en France sur l’accès à l’innovation et notamment aux médicaments du cancer justifient que les patientes aient les éléments nécessaires pour défendre leurs droits à être traitées avec le bénéfice ce ces innovations. Et nous, médecins, nous n’avons pas toujours la capacité de nous faire entendre par les autorités de santé parce que l’on nous soupçonne d’en vouloir toujours plus ou d’avoir des liens avec l’industrie pharmaceutique, par exemple. Les principales intéressées doivent avoir les arguments et le droit de se faire entendre sur ces questions de la prise en charge de l’accès à l’innovation.
- Le cancer du sein est aussi une maladie qui a de fortes répercussions sur la vie quotidienne des patientes. Ce livre digital peut-il améliorer leur accompagnement ?
Pr G.F. : En effet, il y a une chose, le traitement, et une autre, le retour à la vie. Effectivement il ne s’agit pas seulement de guérir une maladie, c’est-à-dire de détruire quelque chose de biologique qui pourrait menacer la vie de la patiente, mais aussi de faire en sorte que la vie d’après soit la plus heureuse possible. Très souvent, nous faisons le constat que la vie d’après est quand même sensiblement plus difficile que la vie d’avant, parce qu’il y a plein de tracas, parce qu’il y a plein de difficultés économiques, parce qu’il y a l’angoisse de la rechute, parce qu’il y a aussi les séquelles des traitements, les difficultés en matière de sexualité. Ce n’est pas ce mythe qui serait que la vie d’après sera plus belle, que l’on ira à l’essentiel, etc …, malheureusement ce n’est souvent pas le cas. D’autant qu’il y a souvent c’est ce que nous montre notre expérience, beaucoup de fatigue qui dure parfois des années et qui nécessite effectivement souvent un accompagnement et des soins de support. Et sur ces points aussi, les patientes ont le droit d’obtenir des réponses aux questions qu’elles se posent.
Ce livre peut être téléchargé sur le site des Editions du Dr Lemoine, https://drlemoine.com