Le film danois Drunk, ou Another Round dans sa version originale, met en scène un professeur et ses amis qui décident ensemble de se lancer un défi : rester modérément ivres toute la journée pour voir comment cela affecte leurs performances sociales et professionnelles. Cette expérimentation se base alors sur les conseils d’un psychiatre qui prétend que les gens ont une carence naturelle en alcool et qu’une alcoolémie de 0,05 % rend plus créatif et plus détendu. Et les premiers effets sur les personnages du film semblent lui donner raison : sentiment de bien-être, épanouissement, meilleure productivité…
Un niveau de consommation quasiment impossible à maintenir
Drunk reste un film et Finn Skårderud, son réalisateur, a très vite voulu clarifier les choses à la sortie du film : il s’agit d’une fiction et non, notre espèce n’est pas née avec un déficit en alcool dans le sang. Dans The Conversation, Harry Sumnall, un professeur en toxicomanie à l’université John Moores de Liverpool, confirme que consommer de très faibles quantités d’alcool n’est pas une bonne solution. “L’alcoolémie est influencée par de nombreux facteurs : la teneur en alcool de la boisson, la vitesse à laquelle vous buvez, votre sexe, votre indice de masse corporelle (IMC) et l’état de votre foie, précise-t-il. Pour se tenir au fameux 0,05%, un homme de 70 kg devrait boire une pinte (568 ml) de bière à 4 % ou un grand verre (250 ml) de vin.”
Maintenir une concentration de 0,05% est presque impossible puisque le corps s’évertue à éliminer l’alcool par l’intermédiaire de l’haleine, de la sueur et de l’urine. “Il faudrait une consommation régulière et mesurée tout au long de la journée, ce qui signifie que la consommation unitaire quotidienne et hebdomadaire dépasserait rapidement les niveaux maximums recommandés”, poursuit le chercheur. C’est d’ailleurs ce qu’il se passe dans le film où les doses bues augmentent rapidement au point que la consommation devienne rapidement incontrôlable.
Des effets délétères dès le premier verre
Le professeur en toxicomanie britannique note toutefois certains traits positifs liés à la consommation d’alcool à faibles doses. Cela permet notamment d’“accroître la sociabilité, en aidant les gens à créer et à entretenir de nouveaux liens d’amitié et des réseaux professionnels.” Cela augmenterait également la relaxation et le sentiment de confiance en soi et permettrait de mettre au point des stratégies de résolution des problèmes plus créatives et diversifiées.
Pour le reste, l’alcool reste nocif pour la santé, même à faibles doses. Au début de l’été, l’Inserm rappelait que même un verre a un effet délétère sur la santé. La question du microdosage est lui-même problématique. Avec le temps, il faudra davantage de drogue pour obtenir les mêmes effets puisqu’il faut boire toujours davantage pour maintenir les effets positifs espérés. “Les méfaits de la consommation régulière d’alcool sont bien connus. Ils sont liés à une série de cancers, de maladies digestives et d’autres dommages sanitaires et sociaux, tant pour le buveur que pour les autres”, ajoute Harry Sumnall.