70% des Français souffrent de troubles du sommeil selon l’étude CoviPrev de Santé Publique France. Le chiffre est en hausse de vingt points par rapport à la période pré-pandémie. Pour éviter les somnifères, certaines personnes utilisent des compléments alimentaires. Leur principe actif est la mélatonine, une hormone naturellement fabriquée par l’organisme pendant la nuit. Vendus en libre-service, ces produits ne sont pas sans danger. C’est le constat réalisé par le magazine 60 millions de consommateurs, qui a mené une étude sur 16 compléments alimentaires à base de mélatonine.
Des compléments alimentaires déconseillés à certains publics
"Prendre de la mélatonine, même à 1 mg, n’est pas innocent", indique le Pr Hervé Vespignani, neurologue et directeur médical des centres de sommeil BioSerenity de Nancy au magazine. Pour certaines personnes, ces compléments alimentaires sont même contre-indiqués. Et sur ce sujet, les conseils d’utilisation présents sur les boîtes ne sont pas toujours explicites. "Aucun produit ne précise que la mélatonine est déconseillée chez les personnes épileptiques, asthmatiques, souffrant de troubles de l’humeur, du comportement ou de la personnalité, de maladies auto-immunes et inflammatoires", explique 60 millions de consommateurs. Tous précisent néanmoins qu’un avis médical est nécessaire pour les femmes enceintes, allaitantes et pour les enfants.
Un manque d’informations
Selon Catherine Bennetau-Pelissero, professeure à l’université de Bordeaux et responsable d’un diplôme sur les compléments alimentaires, interrogée par le magazine, tout le monde devrait solliciter les conseils d’un professionnel de santé avant de prendre ce type de comprimé. D'autant que les notices ne sont pas très précises sur le moment de la prise : cela peut être "avant le coucher" ou "une demie-heure à une heure avant". "Cette hormone n’est efficace sur l’endormissement que si vous la prenez 1 h 30 avant d’aller vous coucher, sinon vous avancez ou reculez vos phases de sommeil", souligne le Pr Hervé Vespignani à 60 millions de consommateurs.
Il est aussi important de limiter la durée d’utilisation de ces compléments alimentaires : un à trois mois au maximum, voire quinze jours pour certains produits. Mais certains emballages peuvent induire le consommateur en erreur : "la boîte de Superdiet Mélatonine contient 120 gélules, alors que l’étiquetage indique une prise consécutive maximum de quatre semaines, soit… 28 gélules ! Certes, il n’y a pas de limite pour une prise non consécutive. Mais un tel conditionnement incite à la consommation et facilite le mésusage." Le risque d’une prise prolongée est de perturber la sécrétion naturelle de mélatonine, et ainsi de faire durer les troubles du sommeil après l’arrêt.
Une première alerte de l’ANSES en 2018
En avril 2018, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail a publié un communiqué sur les compléments alimentaires à base de mélatonine. 90 cas d’effets indésirables lui ont été précédemment signalés : des maux de tête, des vertiges, une somnolence, de l’irritabilité, des tremblements, des nausées ou encore des douleurs abdominales. Après analyse de ces cas, l’ANSES recommande d’utiliser ces compléments de manière ponctuelle uniquement et de prendre conseil auprès d’un professionnel de santé avant d’y recourir.