Instaurée dans plusieurs villes américaines pour dissuader les consommateurs d’acheter des boissons sucrées, la "taxe soda" n’est pas aussi efficace que l’espérait les pouvoirs publics.
C’est ce que révèle une nouvelle étude menée par l’université d'État de l'Ohio. Récemment publiés dans la revue Psychological Science, ces nouveaux travaux révèlent une faille marketing qui empêche la taxe soda d’être vraiment efficace : elle n’est souvent pas indiquée sur les étiquettes de prix dans les magasins, donc les consommateurs ignorent qu’ils paient cette taxe lorsqu’ils achètent la boisson.
"Si les villes veulent que ces politiques soient efficaces, elles doivent réglementer la façon dont ces boissons sucrées sont étiquetées dans les magasins où elles sont vendues, ce qui n'est pas le cas actuellement", explique Grant Donnelly, auteur principal de l'étude et professeur adjoint de marketing au Fisher College of Business de l'université d'État de l'Ohio.
Dissuader en mentionnant la taxe soda
Pour évaluer l’efficacité de la taxe soda sur la consommation de boissons sucrées, les chercheurs se sont concentrés sur quatre villes l’appliquant, dont San Francisco.
Ils ont mené une étude sur le terrain dans deux magasins de proximité de San Francisco, où la taxe sur les boissons sucrées est actuellement de 1 cent par once, soit 12 cents de plus pour une boisson de 12 onces (355 ml).
Les chercheurs ont fait varier les étiquettes de prix placées sur les boissons sucrées pendant les huit semaines de l'étude. Trois étiquettes de prix ont été alternées : La première indiquait simplement le prix de la boisson (1,52 dollar), la seconde le prix et le message "Inclut la taxe soda sur les boissons sucrées", et la troisième comprenait le même message et ajoutait que le produit de la taxe servirait à financer les programmes universitaires locaux.
Toutes les boissons non sucrées, qui n'étaient pas soumises à la taxe, portaient simplement le prix de la boisson, soit 1,40 dollar.
Les chercheurs ont comparé les ventes de boissons pendant la période d'étude aux deux semaines précédentes. Pendant cette période, la taxe sur les boissons sucrées était en vigueur, mais aucune étiquette de prix n'était apposée sur les boissons. Ils ont également comparé les ventes aux deux années précédant la taxe.
Les résultats au cours de ces deux premières semaines ont montré que la taxe n'a pas réduit les achats de boissons sucrées. Toutefois, en examinant ensuite les effets des trois étiquettes de prix différentes, les résultats ont montré que la proportion de boissons sucrées achetées a légèrement diminué (45 %) lorsque les étiquettes mentionnaient que le prix comprenait la taxe soda. Ce n’était pas le cas lorsque les étiquettes indiquaient simplement le prix, mais ne mentionnaient pas la taxe soda.
Ces résultats suggèrent donc que la plupart des consommateurs ont choisi d'éviter les boissons sucrées avec la taxe soda et ont choisi une boisson qui n'était pas soumise à la taxe.
"Les consommateurs ont une aversion pour les taxes, donc lorsqu'ils apprennent que leur boisson préférée est soumise à cette taxe sur les boissons sucrées, certains sont moins intéressés à l'acheter", analyse le Pr Donnelly.
Ne pas révéler le montant de la taxe soda
Pour que l’application de la taxe soda soit efficace, les chercheurs ont cependant constaté que le prix appliqué ne devait pas être mentionné. En effet, en menant une autre étude en ligne, ils ont constaté que les participants estimaient en moyenne à 40 cents le prix de la taxe soda, soit beaucoup plus que les 12 cents effectivement prélevés à San Francisco.
"Les gens n'aiment pas les taxes, mais ils pensent que cette taxe est beaucoup plus élevée qu'elle ne l'est en réalité. Si vous dites aux consommateurs le coût réel de la taxe, elle n'est plus efficace pour réduire les achats", souligne le Pr Donnelly.
Selon lui, si les villes veulent que ces politiques soient efficaces pour réduire la consommation de boissons très sucrées, elles doivent exiger que les étiquettes mentionnent la taxe soda, mais sans en révéler le montant.