Lorsqu’elles sont enceintes, les femmes doivent faire particulièrement attention à ce qu’elles consomment pour s’assurer de la bonne santé de leur futur enfant. Au-delà des recommandations en matière d'alimentation, il faut donc faire attention aux médicaments que l’on prend et proscrire toute consommation d’alcool ou de drogue.
Mais malgré ces recommandations, une femme sur cinq aux États-Unis continue à fumer du cannabis pendant sa grossesse, notamment pour soulager les nausées ou diminuer le stress et l’anxiété. Mais cette consommation n’est pas sans risque pour leur futur enfant.
C’est ce que montre une nouvelle étude de l'Icahn School of Medicine at Mount Sinai et de la City University of New York publiée lundi 15 novembre dans les Proceedings of the National Academy of Science (PNAS). Selon ses auteurs, une exposition in utero au cannabis engendre chez les enfants à naître "niveaux accrus d'anxiété, d'agressivité et d'hyperactivité par rapport aux autres enfants qui n'ont pas été exposés au cannabis pendant la grossesse".
Une plus grande sensibilité au stress et à l’anxiété
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont examiné l'expression des gènes placentaires et le comportement et la physiologie des enfants dans le cadre d'une étude à long terme. Celle-ci a porté sur 322 paires mère-enfant et est menée à New York depuis 2009. Lorsque les enfants avaient environ six ans, les niveaux d'hormones ont été mesurés à partir d'échantillons de cheveux, des enregistrements d'électrocardiogrammes ont aussi été utilisés pour mesurer la fonction cardiaque pendant une situation de stress, et le fonctionnement comportemental et émotionnel a été évalué sur la base de questionnaires auxquels ont répondu les parents.
Les résultats montrent que les enfants de mères ayant consommé du cannabis pendant la grossesse présentaient une anxiété, une agressivité, une hyperactivité et des niveaux de cortisol, l'hormone du stress, plus élevés que les enfants de mères n'ayant pas consommé de cannabis. Cette consommation est aussi associée à une réduction de la composante haute fréquence de la variabilité de la fréquence cardiaque (la variation de l'intervalle de temps entre les battements cardiaques), qui reflète normalement une sensibilité accrue au stress.
Une dégradation du rôle protecteur du placenta
La consommation du cannabis par la mère pendant sa grossesse a aussi affecté le rôle du placenta. Chez ensemble de participants, un séquençage de l'ARN du tissu placentaire a été réalisé, et montre une plus faible expression des gènes d'activation immunitaire, en particulier des cytokines pro-inflammatoires, qui jouent un rôle dans la protection contre les agents pathogènes. La suppression liée au cannabis de plusieurs réseaux de gènes immunitaires placentaires est aussi associée à une plus grande anxiété chez les enfants.
"Les femmes enceintes sont bombardées d'informations erronées selon lesquelles le cannabis ne présente aucun risque, alors que la réalité est que le cannabis est plus puissant aujourd'hui qu'il ne l'était il y a seulement quelques années. Nos résultats indiquent que sa consommation pendant la grossesse peut avoir un impact à long terme sur les enfants, souligne Yasmin Hurd, autrice principale de l'article. Les résultats de l'étude soulignent la nécessité d'une éducation et d'une sensibilisation non biaisées du public et de certaines populations vulnérables de femmes enceintes concernant l'impact potentiel de la consommation de cannabis. La diffusion de ces données et d'informations précises est essentielle pour améliorer la santé des femmes et de leurs enfants."
Cette étude est loin d’être la seule à mettre en lumière le risque de la consommation de cannabis pendant la grossesse sur la santé du fœtus. Des travaux canadiens parus en 2020 dans Scientific Reports ont montré que consommer du cannabis quand on est enceinte entraîne également une réduction du poids du bébé à la naissance, ainsi qu’une diminution de plus de 20 % de la croissance du cerveau et du foie.
Par ailleurs, les femmes qui consomment du cannabis alors qu’elles cherchent à avoir un enfant auraient 40 % de chances en moins de tomber enceintes.