"Le cannabis m'aide dans certains moments de transition. Je peux plus facilement mettre de côté ma liste de choses à faire au travail, ainsi que les défis et les frustrations que j'ai vécus ce jour-là, et me mettre dans un état d'esprit qui me permet d'aider patiemment à faire les devoirs ou de préparer le dîner avec ma fille."
Danielle Simone Brand a 42 ans. Dans une enquête de la BBC, cette Californienne mère de deux enfants de 8 et 11 ans, avoue être une consommatrice régulière de cannabis. Non pas pour "planer", mais pour faire face aux défis de la parentalité.
Son cas est loin d’être isolé. Selon le média britannique, les « cannamoms » (contraction de "cannabis" et de "mom", "maman" en anglais) sont un phénomène de plus en plus répandu aux États-Unis. Danielle Simone Brand leur a même consacré un livre, écrit spécifiquement "pour les mères traditionnelles qui ne connaissent pas grand-chose au cannabis". Selon elle, ce mouvement "affirme que nous pouvons être des parents responsables et consommer du cannabis en même temps".
Une aide pour être plus patiente avec ses enfants
Aux États-Unis et au Canada, l'entrée en vigueur progressive de la légalisation du cannabis a élargi le spectre des consommateurs. Parmi eux, se trouvent désormais des parents, en notamment des mères, qui utilisent cette drogue douce pour les aider à gérer leur vie de parent.
Selon la chercheuse Heather McIlvaine-Newsad, l’émergence du phénomène des cannamoms est aussi due aux réseaux sociaux. Alors qu’en 2018, elles n’étaient qu’une poignée à assumer leur consommation de marijuana sur Facebook, il existe aujourd’hui plus d’une vingtaine de groupes sur le réseau social, et chacun compte plusieurs milliers de membres.
Parmi elles, se trouve Latrese Thomas, 40 ans et mère de trois enfants. Elle reconnaît consommer du cannabis "de la même manière que d’autres boivent du vin".
"Après une longue journée avec les enfants - surtout pendant la pandémie, quand j'étais à la maison avec mes trois bébés, toute la journée - une fois qu'ils étaient endormis, je faisais couler un bain, je mettais des sels de bain au cannabis dans mon bain et je fumais aussi du cannabis", raconte-t-elle.
Le cannabis aide aussi ces mères à rester calmes face à des situations stressantes, particulièrement depuis la pandémie de Covid-19 et les confinements successifs. "Ma consommation de cannabis a non seulement contribué à apaiser ma propre anxiété face à la situation, mais a fait de moi un parent plus patient", affirme ainsi Barinder Rasode, une mère de famille de 53 ans.
Des effets encore inconnus sur la santé
L’essentiel pour ces mères est de microdoser leur consommation de cannabis. "Si je suis parent, je ne veux qu'une dose suffisamment faible pour que cela change un peu ma perspective. Toutes les pensées, les listes de choses à faire et tous les trucs du cerveau de la mère ralentissent suffisamment pour que je puisse être plus présente, plus patiente et plus créative avec mes enfants", explique Barinder Rasode.
"La grande idée fausse est que nous ne fumons que pour planer. Eh bien, non. Je suis toujours une maman. Je dois toujours fonctionner. Je dirige toujours une entreprise. Je dois toujours aller chercher et déposer les enfants et assister aux entraînements", rappelle Latrese Thomas.
À l’heure actuelle, les effets positifs de cette consommation très faible de cannabis sur la santé restent en grande partie inconnus. Une étude publiée en 2017 par l’Académie nationale des sciences a ainsi conclu qu’il y a peu de preuves suggérant que le cannabis peut causer le genre d'effets sur la santé à long terme. Des travaux publiés en 2018 mettent quant à eux en évidence les risques potentiels sur la santé mentale, mais aussi la santé physique, la consommation de cannabis étant liée à une hausse des blessures et des accidents domestiques. Mais ces études concernent des consommations plus importantes, ce qui souligne la nécessité de poursuivre les recherches sur le microdosage, d’autant plus si le phénomène des "cannamoms" s’intensifie dans les années à venir.