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Sommeil et écrans

Les filtres contre la lumière bleue : une fausse protection ?

Par Mégane Fleury

Ces filtres sont censés protéger nos yeux des effets nocifs de la lumière bleue sur la rétine et sur le rythme circadien. En réalité, ils seraient inefficaces voire contre-productifs. 

Wachiwit/istock
La lumière bleue a une longueur d’onde comprise entre 400 et 495 nanomètres.
Elle est naturellement émise par le soleil, mais aussi par les écrans.
Plusieurs études ont montré que les filtres anti lumière bleue n’ont pas d’effet dans la réduction des pathologies de la rétine.

Ils habillent nos lunettes, se déposent sur les écrans de nos ordinateurs, smartphones et autres tablettes : les filtres anti lumière bleue sont de plus en plus répandus. D’après les entreprises qui les commercialisent, ils permettent de lutter contre les effets nocifs de la lumière émise par nos écrans. Dans un article paru sur The Conversation, Conchi Lillo, chercheur de l’université de Salamanque en Espagne, explique qu’ils pourraient être contre-productifs. 

Les effets difficiles à prouver de la lumière bleue 

Notre rythme circadien, soit notre horloge biologique, est conditionné par la lumière. Lorsque nous nous apprêtons à dormir, recevoir de la lumière bleue empêche la production de mélatonine, une hormone favorisant l’endormissement. C’est la théorie derrière les filtres anti lumière bleue : en empêchant cette lumière d’atteindre nos yeux, ils nous permettraient de continuer à utiliser nos écrans, sans conséquence pour notre sommeil. Pour Conchi Lillo, ce lien de cause à effet semble trop vite établi. "La plupart des études réalisées dans ce domaine ne sont pas représentatives de notre exposition moyenne à la lumière bleue, explique-t-il. En effet, la plupart des conditions expérimentales ne correspondent pas à la vie quotidienne d’une personne lambda. Et même dans ce cas, les changements dans la qualité du sommeil restent assez minimes (différences de 10 minutes dans l’endormissement)". Par ailleurs, il souligne que ces études sont généralement réalisées avec un petit nombre de participants, souvent moins d’une vingtaine, qui sont quasiment toujours des hommes. 

Les filtres anti lumière bleue sont-ils vraiment utiles ? 

Le scientifique espagnol rappelle que les études ne confirment pas les effets bénéfiques de ces filtres sur notre sommeil. D’autant que la lumière des écrans n’est probablement pas ce qui nous empêche de dormir : "ce n’est pas tant l’excès de lumière bleue, qui selon les études n’est pas assez puissant pour perturber gravement notre cycle circadien, que ce que nous faisons avec nos écrans qui nous empêche de nous endormir", explique l’auteur. Par ailleurs, les filtres anti lumière bleue peuvent avoir un effet contre-productif. Si l’utilisation des écrans est raisonnée, la lumière bleue est nécessaire, elle transmets des informations qui nous permettent de régler notre rythme circadien. "Lorsque nous utilisons trop de filtres, les informations que notre cerveau reçoit sont confuses. D’une part, les stimuli externes indiquent à notre horloge biologique que nous devons encore être éveillés…Mais de l’autre, en supprimant complètement les informations relatives à la lumière bleue, le cycle de la mélatonine est activé comme si nous étions endormis", détaille le chercheur espagnol. Cette configuration perturbe réellement le rythme circadien, et peut donc dérégler le sommeil. Si vous avez du mal à dormir et que vous soupçonnez votre téléphone d’en être responsable, mieux vaut cesser de l’utiliser le soir, plutôt que d’investir dans des filtres a priori inefficaces!