Peut-on évaluer un risque sanitaire ? N’y a-t-il pas une antinomie fondamentale entre la notion très rationnelle d’évaluation et celle du risque, beaucoup plus liée à la perception individuelle et à la subjectivité ? C’est de ces questions qu’ont débattu le sociologue de la santé publique Michel Setbon et l’ancien vice-président de la Commission d’AMM de l'Afssaps, l'ex agence du médicament, Jean-François Bergmann à l’occasion de la Convention CHAM, qui se déroulait les 27 et 28 septembre à Chamonix.
Enjeu d’importance, puisqu’une évaluation ratée peut déboucher sur une crise, l’évaluation du risque sanitaire ne peut se résumer à l’examen d’un médicament avant son arrivée sur le marché, l’évaluation doit être un processus continu tout au long de la commercialisation du produit.
« La notion-clef, c’est le bénéfice/risque, c’est le reflet le plus précis de la vie du médicament », a souligné le Pr Bergmann. « D’autant qu’au regard des bénéfices attendus, la société est prête à accepter une évaluation des risques accélérée, comme ce fut le cas pour les premiers traitements du Sida », a ajouté Michel Setbon. Mais des pilules de 3e et 4e générations aux nouveaux anticoagulants oraux, les exemples récents mettent en lumière un problème bien français : l’appétence des prescripteurs pour les nouvelles molécules, dont l’évaluation du bénéfice/risque manque encore de recul.
Pour le Pr Bergmann, les patients ont un rôle décisif à jouer en ajoutant leur voix dans cette évaluation en temps réel des médicaments qui leur sont prescrits.
PourquoiDocteur – Pensez-vous que la notion de bénéfice/risque soit vraiment audible par les patients ? Lorsqu’on prend un médicament pour se soigner, l’idée qu’il puisse vous faire du mal est difficilement acceptable ?
Pr Jean-François Bergmann, ancien vice-président de la Commission d’AMM de l'Agence du médicament
PourquoiDocteur – Mais jusqu’ici, l’évaluation du bénéfice/risque, c’est une affaire de spécialistes, en commission d’AMM. Le patient a son mot à dire ?
Pr Jean-François Bergmann
PourquoiDocteur – L’évaluation du risque reste-t-elle possible alors que le médecin est soumis en quelque sorte à une obligation de résultat ?
Pr Jean-François Bergmann