L’isotrétinoïne orale (Curacné®, ex-Roaccutane®) est actuellement le seul traitement potentiellement curatif des acnés sévères, qui peuvent générer des cicatrices importantes sur la peau et dégrader considérablement la qualité de vie des malades. Lors des Journées dermatologiques de Paris, le Pr Marie Beylot-Barry a rappelé les nouvelles règles de prescription de ce médicament, déjà très encadrée au vu des risques qu’il peut faire courir aux fœtus (malformations) et aux adolescents (dépression, suicide). Elle a également proposé de nouvelles actions.
"Un risque de décompensation psychique ne peut être exclu"
Habituellement prescrite en deuxième intention, après échec des traitements initiaux notamment à base de cyclines, l’isotrétinoïne orale doit être initiée par le dermatologue. Il valide l’indication et adapte la prescription, en tenant compte des risques d’effets secondaires qu’il faut savoir anticiper et gérer. "En premier lieu, le risque de malformation du fœtus impose une contraception efficace avant l’initiation du traitement, pendant toute la durée du traitement et pendant le premier mois suivant l’arrêt du traitement", explique le Pr Marie Beylot-Barry (CHU de Bordeaux).
"Concernant les troubles psycho-comportementaux rapportés, il est souvent difficile de faire la part entre l’origine médicamenteuse, l’acné elle-même ou les troubles psychologiques liés à l’adolescence", ajoute l’experte. "S’il n’a pas été relevé d’augmentation d’incidence des dépressions et des idées suicidaires à l’échelle populationnelle, un impact individuel avec un risque de décompensation psychique ne peut être exclu, nécessitant de rester fortement à l’écoute des patients", poursuit-elle. Enfin, la sécheresse cutanée quasi-constante provoquée par l’isotrétinoïne orale est souvent très inconfortable au quotidien. "Des conseils adaptés pour limiter cette sécheresse doivent être donnés pour accompagner au mieux les patients", juge Marie Beylot-Barry.
Des mesures de renforcement
Outre les mesures déjà mises en place, des mesures de renforcement ont été instaurées :
- nécessité d’une double consultation avant toute initiation de traitement (une consultation d’information, suivie d’une consultation de prescription), afin de laisser un délai de réflexion suffisant au patient.
- Prescription d’une contraception d'urgence et de préservatifs de façon systématique en cas de contraception orale (œstro-progestative ou progestative), considérée comme moins fiable qu’un DIU (Dispositif Intra-Utérin) ou un implant.
- Suivi médical mensuel de tous les patients, y compris masculins, afin de s’assurer de la bonne tolérance du traitement au long cours.
Des actions supplémentaires
Le renouvellement du traitement peut être assuré par le dermatologue, mais aussi par le généraliste, ou en alternance, "nécessitant une bonne coordination entre les deux", juge Marie Beylot-Barry. "La diffusion de l’information et l’amélioration de la communication entre professionnels représentent donc des enjeux importants et des actions en ce sens doivent être menées", note la vice-présidente.
"Il serait aussi souhaitable, comme cela a été souligné lors des rencontres avec l’ANSM, de renforcer les outils d’information (leaflets, QR code sur les boîtes de médicaments renvoyant à des notices explicatives...) afin d’aider au mieux les patients avec des conseils pratiques dans la gestion des effets secondaires potentiels", conclut-elle. Un projet d’information des pharmaciens, souvent premier interlocuteur des patients, est également en cours.