L'Agence de sécurité du médicament conteste toute dissimulation dans l'affaire des prothèses mammaires frauduleuses PIP. Dans un article publié mardi, le site d'information Mediapart prétendait, en effet, que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) était en mesure de suspendre la commercialisation en France des prothèses mammaires frelatées dès 2007 ou 2008, et non pas en 2010 comme ce fut le cas. Une information que Mediapart affirmait tirer d'un rapport interne à l'Afssaps jamais publié. Parmi les accusations, le site reprochait notamment à l'Agence d'avoir « expurgé des éléments qui pointaient les manquements importants de la gestion par l'Afssaps de l'affaire PIP », dans le rapport officiel remis au ministre de la Santé Xavier Bertrand en février 2012. Ce dernier ne contenait pas, selon Mediapart, les données de matériovigilance fournies par le fabricant, mais seulement les rapports des professionnels de santé qui ont tendance à sous-notifier les effets indésirables. N'y figurait pas non plus, « l'exposé complet des données de toxicologie recueillies par l'Agence, notamment des analyses qui montraient la présence d'une teneur élevée en D4 », un reprotoxique contenu dans les gels des prothèses mammaires PIP.
L'Agence dément avoir expurgé son rapport officiel
Dans un communiqué de presse publié mardi soir, l'Ansm rappelle qu'elle a rendu public le 1er février 2012, un rapport officiel détaillé incluant une chronologie des faits, une analyse des données de matériovigilance, le résultat des inspections effectuées par les autorités sanitaires, la synthèse des données toxicologiques disponibles sur les gels de silicone utilisés pour le remplissage des prothèses mammaires de la société PIP et les actions de sécurité sanitaire menées.
Et l'Agence de rajouter que « ce n'est que deux mois après la remise publique de ce rapport qu'un salarié de l'Ansm a remis de sa propre initiative à la direction générale une analyse personnelle et rétrospective établie sur la base des mêmes données toxicologiques et de matériovigilance que celles figurant dans le rapport remis au ministre le 1er février 2012. »
Conclusion de l'Agence, « le rapport officiel rendu public deux mois plus tôt n'a en aucun cas été expurgé des éléments contenus dans un document produit ultérieurement. » De plus, elle affirme avoir remis spontanément au juge d'instruction en charge de l'affaire PIP le document élaboré par son salarié et assure collaborer depuis le début de l'enquête avec la justice en vue de la manifestation de la vérité et afin que toutes les responsabilités puissent être établies.
Pas d'augmentation des ruptures de prothèses dès 2006
Autre polémique, selon Mediapart, le rapport indiquait que « l'augmentation des ruptures pour les prothèses PIP est amorcée dès 2006. » L'Afssaps aurait donc pu réagir dès 2007, ou au plus tard en 2008, ce qui aurait permis d'éviter l'implantation de 6445 à 10466 femmes, soit un tiers des porteuses d'implants, rappelle Mediapart.
Interrogé par le Figaro santé sur ce point, François Hébert, directeur général adjoint de l'Ansm répond : « Si l'agence avait fait ce constat à l'époque, elle n'aurait jamais laissé ce dossier en l'état (...) En 2008, nous n'avions que des signalements en nombre très faible. Ce n'est qu'au cours de l'année suivante que leur nombre a augmenté significativement et que nous avons pris les mesures nécessaires », conclut-il.
En France, le nombre de femmes porteuses de prothèses mammaires PIP est estimé à environ 30000. A l'heure actuelle, plus de 16.000 de ces femmes se sont déjà fait retirer ces prothèses, d'après le dernier bilan arrêté fin mai par l'Ansm. Ces victimes devront toutefois attendre le 10 décembre pour connaître le sort réservé à Jean-Claude Mas, le fabricant français de ces prothèses contenant un gel de silicone frauduleux. C'est la date fixée par le tribunal correctionnel de Marseille pour rendre son jugement.