Nos cellules se renouvellent et se transforment. Parfois, ce phénomène naturel génèrent des mutations qui peuvent être cancérigènes. Mais quelle est la proportion de ces cellules dans notre organisme ? Une équipe de recherche de l’université du Colorado, aux États-Unis, a réalisé une estimation. Les résultats de leurs travaux sont publiés dans la revue scientifique Aging and Cancer. Les scientifiques estiment qu’après 60 ans, un individu possède au moins 100 milliards de cellules, avec au moins une mutation cancérigène, dans son organisme.
Des mutations inévitables
"Nous savions que beaucoup de mutations chez l'homme sont associées au cancer, mais nous ne savions tout simplement pas combien", indique Edward J. Evans, auteur principal de cette étude. "Lorsque vous avez des milliards de cellules et qu'elles survivent jusqu’à un siècle, elles vont accumuler des mutations, ajoute le co-auteur, James DeGregori. Le fait que nous ayons des mutations n'est pas surprenant."
L’équipe a collecté des ensembles de données auprès de chercheurs qui avaient précédemment mené des recherches sur les mutations dans les tissus humains normaux. Edward J. Evans a appris à coder pour créer un algorithme capable d’extraire les données nécessaires, puis de créer des blocs pour catégoriser les mutations en fonction des gènes, des tissus et de l'âge des individus. "Pour comprendre la genèse du cancer, nous devons examiner les tissus normaux, explique le scientifique américain. Au moment où le cancer apparaît, toutes les mutations sont là et nous ne savons pas toujours lesquelles contribuent réellement à la maladie."
Un nombre élevé de cellules associées au cancer
Cette analyse a révélé qu’une personne de plus de 60 ans possède au moins 100 milliards de cellules présentant des mutations oncogènes."Nous avons environ trois milliards de cellules nucléées dans notre corps, donc pour le mettre en perspective, 100 milliards de cellules avec des mutations oncogènes ne représentent pas la majorité de notre nombre total de cellules, précise Edward J. Evans. Mais c'est un nombre étonnamment élevé étant donné qu'il suffit d'une cellule pour provoquer un cancer." Les scientifiques s’interrogent sur les conséquences de ces mutations dans la mesure où des individus peuvent avoir des milliards de cellules avec ces mutations oncogènes sans développer de cancer.
Comment interpréter ces résultats ?
Les auteurs de cette recherche ont constaté que les mutations oncogènes sont extrêmement répandues dans certains types de tissus : la peau, le côlon et l’œsophage. Ces mutations peuvent être dominantes dans certains de ces tissus. "Si vous regardez l'œsophage, par exemple, la moitié des tissus est chargée de mutations NOTCH1, qui contribuent rarement au cancer chez les non-fumeurs, indique James DeGregori. Tester cette mutation n'est pas vraiment utile si la plupart d'entre nous l'ont et s'il conduit rarement au cancer." Pour les scientifiques, la recherche des mutations oncogènes est inutile et chronophage comme tout le monde en possède et qu'elles ne sont pas forcément synonyme de cancer. "La façon dont ces mutations oncogènes interagissent avec l'environnement tissulaire nous en dira beaucoup plus sur le risque", ajoute le chercheur. De futurs travaux seront dédiés à l’observation des tissus afin de comprendre pourquoi certains d’entre eux présentent une fréquence élevée de mutations oncogènes, sans risque associé de cancer.