- Les feux de cheminée produisent autant de hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) que les véhicules diesel et essence. Les HAP sont des substances chimiques provenant de la combustion incomplète de matières organiques.
- Mais l'étude, menée pendant une année complète à Athènes, montre que la combustion du bois produit des HAP plus cancérigènes que le trafic routier.
Plébiscités par les Français pour son côté réconfortant et pittoresque, les feux de cheminée ne sont pourtant pas sans danger pour l’environnement. Selon la Direction Régionale et Interdépartementale de l'Environnement, de l'Aménagement et des Transports (DRIEE), s’il le chauffage au bois représente 35 % des émissions de particules fines PM2.5, contre 30% pour le trafic routier.
Et cela a des conséquences sur la santé. Dans une étude publiée dans la revue Atmospheric Chemistry and Physics, des chercheurs montrent que le chauffage au bois produit plus de substances chimiques cancérigènes que le trafic routier.
En cause : les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) présents dans les minuscules particules de pollution, et qui sont produits en cas de combustion incomplète de matières organiques. Connus depuis longtemps pour leurs effets cancérigènes, ils sont davantage produits par la combustion du bois que par le diesel ou l’essence.
Le chauffage du bois est un facteur de risque de cancer
L’an dernier, une autre étude avait montré que le chauffage au bois dans les foyers est la plus grande source de pollution atmosphérique par les petites particules au Royaume-Uni, produisant trois fois plus que le trafic routier, bien que seulement 8 % de la population utilise des poêles à bois.
Dans le cadre de cette nouvelle étude, les chercheurs ont prélevé des échantillons de fond de l'air à Athènes chaque jour pendant un an. Ils ont été analysés pour 31 HAP et un large éventail d'autres marqueurs chimiques, associés à différentes sources de pollution. Ils ont alors constaté que 31 % des HAP annuels provenaient de la combustion du bois, principalement en hiver, 33 % du diesel et du pétrole, et 29 % de l'essence.
Mais l’étude montre également que certains HAP sont plus cancérigènes que d’autres. Or, lorsque les chercheurs ont pris cette donnée en compte, la proportion du risque de cancer résultant de la combustion du bois est passée à 43 %, le diesel et le pétrole à 36 % et l'essence à 17 %.
"Nous savons que la fumée de bois est beaucoup plus toxique que d'autres types de particules, souligne dans The Guardian Athanasios Nenes, de la Fondation pour la recherche et la technologie Hellas à Patras, en Grèce, et les résultats montrent clairement que le chauffage au bois est le principal facteur de risque de cancer à long terme."
"La fumée de bois est particulièrement puissante et provoque toutes sortes d'affections, du cancer au stress oxydatif, qui entraîne des crises cardiaques et des accidents vasculaires cérébraux, en passant par l'obésité, le vieillissement prématuré, le diabète - tout ce qui a trait à l'inflammation dans le corps. Dans l'ensemble, le chauffage au bois m'inquiète donc beaucoup", poursuit le Pr Nenes.
Une qualité de l’air dégradée dans toute l’Europe
Selon le scientifique, le cas d’Athènes "n’est pas une exception - elle est plutôt représentative d'une règle", car le chauffage au bois domestique dégrade la qualité de l’air urbain dans l’ensemble des pays européens.
La concentration annuelle moyenne des HAP dans l'étude réalisée à Athènes était d’ailleurs inférieure aux limites de l'Union europénne, mais le double du niveau de référence de l'Organisation mondiale de la santé. D'après les données de l'OMS, les HAP présents à Athènes devraient provoquer cinq cas de cancer supplémentaires pour 100 000 personnes, indiquent les chercheurs.
"Compte tenu de [l'exposition aux agents cancérigènes] et de l'utilisation étendue du chauffage au bois dans toute l'Europe, notamment en France, en Allemagne, en Irlande et au Royaume-Uni, une action et des politiques européennes visant à réglementer les émissions du chauffage au bois sont immédiatement nécessaires, car elles peuvent avoir des effets bénéfiques considérables sur la santé publique", ont déclaré les scientifiques.
Parmi les pistes évoquées, celle d’instaurer des "journées sans combustion". Mais pour le Pr Alison Tomlin de l'université de Leeds, "l'application d'une telle politique, ou même de restrictions plus larges sur le chauffage au bois dans les zones densément peuplées, pourrait être difficile".