En France, 600.000 personnes souffrent de schizophrénie. Au niveau mondial, cette maladie toucherait environ 0,7 à 1 % de la population, selon l’Inserm. Il s’agit d’une pathologie psychiatrique qui se manifeste généralement entre 15 et 25 ans. Ses symptômes (retrait social, difficultés cognitives, hallucinations, délires...) sont très différents, ce qui complexifie le diagnostic. Mieux comprendre et dépister cette maladie permettrait ainsi de la traiter plus efficacement et d’intervenir plus tôt afin de limiter sa gravité. Pour cela, plusieurs scientifiques tentent d'identifier des marqueurs de cette pathologie. L’objectif, à terme, est que les médecins puissent prescrire des analyses à leur patient pour voir si ces marqueurs sont présents.
Un manque de glutathion chez les patients atteints de schizophrénie
Une équipe de chercheurs vient de découvrir deux nouveaux marqueurs sanguins de la schizophrénie. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Molecular Psychiatry. Un marqueur sanguin est une molécule dont la présence dans le sang exprime la présence d'un état ou d'une maladie. Pour en identifier ceux de la schizophrénie, les scientifiques se sont intéressés aux neurones à parvalbumine et aux mitochondries de ces neurones. Les mitochondries sont des organites présents dans les cellules. Ces dernières sont sources d’énergie et de respiration cellulaire. Elles sont ainsi importantes pour la bonne santé des neurones à parvalbumine.
"Une molécule du système antioxydant, le glutathion, est déficiente chez les patients et patientes schizophrènes. Son manque mène à une altération des neurones à parvalbumine, un type de neurone directement impliqué dans toutes les fonctions cognitives du cerveau, donc de la pensée", a expliqué Kim Q. Do, professeure en neurosciences au Centre de neurosciences psychiatriques (CNP) en Suisse et l’un des auteurs de cette étude.
Le rôle des mitochondries parfois dysfonctionnelles
Les chercheurs ont noté que les mitochondries dysfonctionnelles s’accumulaient dans le cerveau de certains patients atteints de schizophrénie car elles n'étaient plus éliminées ou recyclées. Cet accumulation des mitochondries dysfonctionnelles augmente le stress oxydatif, qui peut être défini comme une agression des cellules par des espèces réactives de l'oxygène (ERO). Habituellement, les ERO sont détruites par les molécules antioxydantes, mais leur production est altérée en cas de stress oxydatif. Elles peuvent donc facilement détruire nos cellules neuronales. À terme, le stress oxydatif, en partie, peut causer la mort des neurones.
Lors de leurs expériences, les scientifiques ont observé que miR137 et COX6A2, deux molécules, étaient plus particulièrement sensibles au stress oxydatif. Chez les patients atteints de schizophrénie, la quantité de miR137 était particulièrement élevée ce qui indique, d’après les chercheurs, que le système de nettoyage des mitochondries dysfonctionnelles ne s’activait pas suffisamment. Autrement dit, les mitochondries dysfonctionnelles s’accumulaient car les molécules miR137 étaient présentes en quantité importante. En revanche, le taux de COX6A2 était très bas chez les participants de l’étude, ce qui explique la mauvaise respiration cellulaire, l’un des rôles des mitochondries. Comme cette fonction des mitochondries était altérée chez ces patients schizophrènes, il s’agit donc bien d’un marqueur.
Améliorer le traitement des patients ayant des anomalies mitochondriales
Les chercheurs ont estimé que miR137 et COX6A2 pouvaient donc être des marqueurs de la schizophrénie et l’ont recherché dans le sang de patients atteints de cette pathologie. Ainsi, deux catégories de patients ont été découvertes : ceux qui avaient des problèmes de mitochondries et ceux qui n’en avaient pas. "Les patients et patientes souffrant d’un défaut mitochondrial ont des symptômes cliniques plus sévères que les autres", a développé Inès Khadimallah, auteure de l'étude. Ces patients avaient une plus grande perte d’autonomie. Les scientifiques en ont conclu que miR137 et COX6A2 étaient deux marqueurs sanguins chez des patients schizophrènes ayant des anomalies mitochondriales.
À terme, ces travaux pourraient permettre de mettre au point de nouveaux traitements. Les patients ayant des anomalies mitochondriales pourraient bénéficier d’un traitement antioxydant, ce qui améliorerait l’état de leurs neurones à parvalbumine et les symptômes de leur maladie.