- Le nombre de cas de démence dans le monde pourrait atteindre les 153 millions.
- Les pays les plus touchés seront ceux d'Afrique subsaharienne orientale, d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
- Les chercheurs appellent à la mise en oeuvre de politiques de prévention nationales contre les facteurs de risque que sont l'obésité, le tabagisme et l'hyperglycémie, et à améliorer l'accès à l'éducation dans les pays à revenu faible et intermédiaire.
Faut-il s’attendre à une "épidémie" de cas de démence d’ici le milieu du siècle ? C’est en tout cas l’inquiétante prévision faite par des chercheurs dans de l'Institute for Health Metrics and Evaluation (IHME) de l'Université de Washington, aux États-Unis.
Dans une étude publiée dans The Lancet Public Health qui passe en revue diverses données démographiques et facteurs de risque connus de la démence, ils expliquent qu’il faut s’attendre à une explosion des cas mondiaux d’ici 2050, où 153 millions de personnes devraient vivre avec une démence dans le monde, contre 57 millions en 2019.
Selon leurs prédictions, les cas augmenteront dans l’ensemble des pays du globe, mais avec des disparités selon les régions du monde. Ainsi, les plus faibles augmentations sont estimées dans la région Asie-Pacifique à revenu élevé (53 %) et en Europe occidentale (74 %), et la plus forte croissance en Afrique du Nord et au Moyen-Orient (367 %) et en Afrique subsaharienne orientale (357 %).
Des régions du monde inégalement touchées par la démence
Cette analyse complète, menée dans 204 pays, a aussi passé en revue les facteurs de risque de la démence. Si l’explosion des cas est en grande partie imputée à la croissance démographique et au vieillissement de la population, l’augmentation du tabagisme, de l'obésité et de l'hyperglycémie, ainsi que le faible niveau d'éducation auront aussi un impact sur les futures tendances.
Par exemple, l’amélioration de l'accès à l'éducation dans le monde devrait permettre de réduire la prévalence des démences de 6 à 2 millions de cas dans le monde d'ici 2050. Mais cette réduction sera contrebalancée par les tendances prévues en matière d'obésité, d'hyperglycémie et de tabagisme, qui devraient entraîner 6 à 8 millions de cas de démence supplémentaires. Mais cette réduction sera contrebalancée par les tendances prévues en matière d'obésité, d'hyperglycémie et de tabagisme, qui devraient entraîner 6 à 8 millions de cas de démence supplémentaires.
Toutes les régions du monde ne sont pas égales face à l’explosion des cas. Les chercheurs prévoient ainsi que la plus forte augmentation de la prévalence se produira en Afrique subsaharienne orientale, où le nombre de personnes atteintes de démence devrait augmenter de 357 %, passant de près de 660 000 en 2019 à plus de 3 millions en 2050. Cela sera principalement dû à la croissance démographique. L’augmentation des cas de démence n’épargnera pas l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Ces derniers connaîtront une hausse de 367 % des cas, passant de près de 3 millions de cas à près de 14 millions, avec des augmentations particulièrement importantes au Qatar (1 926 %), aux Émirats arabes unis (1 795 %) et au Bahreïn (1 084 %).
En revanche, la plus faible augmentation du nombre de cas de démence est prévue dans la région Asie-Pacifique à revenu élevé, où le nombre de cas devrait augmenter de 53 %, passant de 4-8 millions en 2019 à 7-4 millions en 2050. Le Japon ne sera que très faiblement touché, ce qui suggère que des mesures préventives comme l’amélioration de l’éducation et la promotion de modes de vie sains, ont un réel impact.
La tendance sera aussi plus mesurée en Europe occidentale, avec une augmentation de 74 %. Les cas de démence devraient passer de près de 8 millions en 2019 à près de 14 millions en 2050. La Grèce (45 %), l’Italie (56 %), la Finlande (58 %), la Suède (62 %) et l’Allemagne (65 %) seront les moins touchés, tandis qu’au Royaume-ni, le nombre de cas de démence devrait bondir de 75 %.
Agir maintenant avec des politiques nationales ciblées
À l'échelle mondiale, les femmes sont aussi plus nombreuses à être touchées par la démence que les hommes. Déjà en 2019, les femmes atteintes de démence étaient 100 fois plus nombreuses que les hommes atteints de démence. Cette tendance devrait se maintenir en 2050, qui n’est pas nécessairement liée à l’espérance de vie plus longue des femmes, explique le Dr Dr Jaimie Steinmetz, qui a codirigé l’étude. "Il existe des preuves de différences entre les sexes dans les mécanismes biologiques qui sous-tendent la démence. Il a été suggéré que la maladie d'Alzheimer pourrait se propager différemment dans le cerveau des femmes que dans celui des hommes, et plusieurs facteurs de risque génétiques semblent liés au risque de maladie selon le sexe."
Pour les auteurs, ces chiffres soulignent l’urgence de l’action contre la démence, notamment dans les pays à revenu faible ou intermédiaire qui seront plus durement touchés. Ils conseillent de "mettre en œuvre dès maintenant des politiques nationales susceptibles d'atténuer les facteurs de risque de démence pour l'avenir, par exemple en donnant la priorité à l'éducation et à des modes de vie sains". Il faut aussi "veiller à ce que les inégalités structurelles en matière d'accès aux services de santé et aux services sociaux puissent être corrigées et [à ce] que les services puissent être adaptés aux besoins sans précédent d'une population âgée croissante ayant des besoins de soins complexes", souligne le professeur Theo Vos, coauteur de l'étude.