- Selon l'association Avortement sans frontières, près de 32 000 femmes ont demandé de l’aide en 2020 pour avorter en Pologne.
- Depuis janvier 2021, la Pologne interdit l'avortement en cas de "malformation grave et irréversible du fœtus ou de maladie incurable qui menace la vie du fœtus".
Les lois polonaises très restrictives en matière d’avortement ont encore fait une victime. Mardi 25 janvier, Agnieszka T., 37 ans, est décédée suite à de longues souffrances après qu’on lui a refusé une interruption volontaire de grossesse (IVG) thérapeutique.
Un refus d’interruption de grossesse thérapeutique
Mère de trois enfants, elle était enceinte de jumeaux dont l’un est décédé le 23 décembre 2021. Dans un communiqué diffusé sur Facebook et relayé par TV5 Monde, la famille de la jeune femme raconte qu’elle était enceinte de moins de trois mois et que, suite à de violentes douleurs abdominales et des vomissements, elle s’était rendue au service de gynécologie de l'hôpital de Czestochowa, dans le sud du pays. "Ses plaintes avaient été rejetées auparavant, le personnel médical expliquant qu’il était normal de ressentir de la douleur en cas de grossesse gémellaire", écrivent les proches de la jeune femme.
Ce refus de prise en charge lui a encore été opposé lorsque la mort d’un des deux fœtus a été constatée. Les médecins ont refusé de l’extraire par crainte d’enfreindre la loi anti-avortement en vigueur dans le pays. "Ils ont attendu que les fonctions vitales de l'autre jumeau s'arrêtent d'elles-mêmes. Agnieszka a porté un enfant mort dans son utérus pendant encore sept jours. La mort du deuxième des jumeaux n'est survenue que le 29 décembre 2021", explique la famille.
Une septicémie probablement en cause
Après des semaines de souffrance, Agnieszka T. est décédée à l’hôpital, mais les médecins ont déclaré ignorer la cause de son décès. "Nous soulignons que le personnel de l'hôpital a fait toutes les actions nécessaires pour sauver la patiente", affirme l’établissement dans un communiqué.
Pour la famille, le décès d’Agnieszka est surtout "la preuve que le gouvernement actuel a du sang sur les mains". Pour le prouver, elle a mis en ligne une vidéo de la jeune femme peu avant son décès, où elle apparaît très affaiblie et visiblement incapable de parler. Ses proches pensent qu’elle est décédée d’une septicémie, c’est-à-dire une infection généralisée, mais n’a pas été autorisée à consulter son dossier médical.
Une loi très restrictive en matière d’avortement
Cette loi anti-avortement est en vigueur en Pologne depuis janvier 2021. Elle interdit toute interruption de grossesse, sauf en cas de viol et d'inceste, ou lorsque la vie ou la santé de la mère sont considérées en danger. Mais, selon les militants pour les droits humains et les ONG comme Human Rights Watch, l'Organisation mondiale contre la torture, cette loi est "dévastatrice" pour les femmes car elle les force à mener à terme des grossesses non viable.
Le cas d’Agnieszka T. n’est pas isolé. Le 22 septembre dernier, Izabel, 30 ans, est morte d’une septicémie dans un hôpital de Pszczyna, au sud de la Pologne. Enceinte de 22 semaines, l’équipe médicale avait refusé de procéder à une interruption de grossesse ou une césarienne alors que le décès du fœtus avait été constaté. L’hôpital a depuis été condamné à verser une amende pour "faute médicale".
La mort d'Agnieszka a à nouveau suscité l'indignation de l'opposition et des militant-e-s des droits des femmes. De nombreuses personnes se sont rassemblées devant la Cour constitutionnelle à Varsovie pour protester contre la loi anti-avortement.