Maladie aiguë et grave provoquée par le virus du même nom, la fièvre Ebola pourrait, des années après l’infection, réapparaître et provoquer le décès. Et ce, même si le patient a suivi un traitement par anticorps monoclonaux.
Voici ce qu’on découvert des chercheurs de l'U.S. Army Medical Research Institute of Infectious Disease en menant des expériences auprès de primates non humains. Selon eux, certaines épidémies récentes d’Ebola en Afrique ont été liées à une infection persistante chez des patients qui avaient survécu à des épidémies antérieures. Ce serait notamment le cas de l’épidémie qui a sévi en 2021 en Guinée, et qui serait réapparue chez une survivante infectée de manière persistante cinq ans auparavant. Les résultats de leurs conclusions viennent d’être publiés dans Science Translational Medicine.
Une persistance du virus dans le système ventriculaire du cerveau
Jusqu’à présent, la "cachette" exacte du virus Ebola persistant et la récurrence de la maladie chez les survivants restaient inconnues. Le Pr Xiankun (Kevin) Zeng et son équipe ont donc cherché à éclairer ces zones d’ombre.
"Nous avons constaté qu'environ 20 % des singes qui ont survécu à une exposition mortelle au virus Ebola après avoir été traités par des anticorps monoclonaux présentaient encore une infection persistante par le virus Ebola (…) même lorsque le virus Ebola avait été éliminé de tous les autres organes." Selon les chercheurs, le virus se logerait spécifiquement dans le système ventriculaire du cerveau, dans lequel le liquide céphalo-rachidien est produit, circule et est contenu.
Parmi les signes suivis par les scientifiques, deux qui s'étaient initialement remis de la maladie après avoir été traités par des anticorps thérapeutiques ont vu réapparaître des signes cliniques graves d'infection et ont succombé à la maladie. Une inflammation sévère et une infection massive par le virus Ebola étaient présentes dans le système ventriculaire de leur cerveau. Aucune pathologie évidente ni infection virale n'ont été constatées dans les autres organes.
Deux cas connus de résurgence d’Ebola chez des humains
Ce n’est pas la première fois que cette résurgence du virus Ebola chez des survivants est constatée. L’an dernier, une infirmière britannique a connu une récidive dans le cerveau et a développé une méningo-encéphalite neuf mois après s'être remise d’Ebola. Elle avait reçu des anticorps thérapeutiques pendant l'épidémie de 2013-2016 en Afrique de l'Ouest, la plus grande épidémie connue à ce jour depuis la découverte du virus en 1976. En outre, un patient vacciné qui avait été traité par des anticorps thérapeutiques monoclonaux contre la maladie à virus Ebola six mois plus tôt a rechuté et est décédé à la fin de l'épidémie de 2018-2020 en République démocratique du Congo. Malheureusement, ce cas a également entraîné de nombreuses transmissions interhumaines ultérieures.
Un renforcement du suivi à long terme des patients
Au cours des dernières années, l’équipe du Pr Zeng a réalisé des études systématiques sur la persistance du virus Ebola en utilisant les survivants des primates non humains comme modèle. Elle a ainsi pu démontrer que le virus peut aussi se cacher et persister dans des régions spécifiques d'organes immunisés, comme la chambre vitrée des yeux et les tubules séminifères des testicules.
"Le virus Ebola persistant peut se réactiver et provoquer une rechute de la maladie chez les survivants, ce qui pourrait entraîner une nouvelle épidémie", souligne Jun Liu, coauteur principal de l’étude.
"Heureusement, avec ces vaccins et anticorps monoclonaux thérapeutiques approuvés, nous sommes dans une bien meilleure position pour contenir les épidémies", ajoute le Pr Zeng. Ce dernier souhaite cependant un renforcement du suivi à long terme des survivants d’Ebola, même ceux traités par anticorps monoclonaux, afin de prévenir la recrudescence de la maladie.