Finlande, Danemark, Suisse, Islande et Pays-Bas. Ces cinq pays sont les plus heureux du monde, selon le classement du World Happiness Report 2021 dévoilé en mars dernier. Mais leurs habitants voient-ils réellement la vie en rose ? C’est la question que se sont posés Brock Bastian, professeur de psychologie à l’université de Melbourne (Australie), et Egon Dejonckheere, professeur à l'université de Tilbourg (Pays-Bas). Pour en avoir le cœur net, ils ont décidé de réaliser une étude sur le bien-être avec des chercheurs du monde entier. Les résultats de leurs travaux ont été publiés dans la revue Scientific Reports le 17 février.
"Le bonheur est une expérience précieuse, et les sociétés veulent que leurs citoyens soient heureux. Bien que cet engagement sociétal semble louable, le fait d'insister excessivement sur la positivité peut créer une norme émotionnelle inaccessible qui, ironiquement, compromet le bien-être individuel", ont écrit les auteurs dans les recherches. Pour mener à bien leur étude, les scientifiques ont interrogé 7.443 personnes de 40 pays sur leur bien-être émotionnel, la satisfaction à l’égard de leur vie (bien-être cognitif) et leurs troubles de l’humeur (bien-être clinique). Ils ont ensuite examiné comment ces réponses différaient en fonction du taux de bonheur des pays.
Une pression sociale pour être heureux s’avère néfaste au bien-être mental
D’après les résultats, la pression ressentie par les habitants pour être heureux est associée à un bien-être médiocre dans les pays qui ont un taux de bonheur plus élevé. En clair, lorsque les personnes déclarent ressentir une pression qui les pousse à être heureux et à ne pas être triste, ils ont tendance à présenter des déficits de santé mentale, ont expliqué Brock Bastian et Egon Dejonckheere dans une publication du média The Conversation. Ainsi, ces adultes sont moins satisfaits de leur vie, éprouvent davantage d’émotions négatives et présentent des niveaux plus élevés de dépression, d’anxiété et de stress.
"Nos résultats soulignent le lien entre l'évaluation des émotions sociales et le bien-être individuel, et suggèrent que des niveaux de bonheur nationaux élevés peuvent avoir des inconvénients pour certains", tels que les personnes qui ressentent déjà une forte pression pour garder le moral, ont précisé les chercheurs.
"À un niveau personnel, exprimer son bonheur est une bonne chose. Mais, comme l'ont montré d'autres recherches, il est parfois bien d'être sensible à la façon dont notre expression d'émotions positives peut affecter les autres. S'il est bon de faire preuve de bonheur et de positivité dans nos interactions sociales, il est également bien de savoir quand se faire plus discret, et ainsi éviter d'aliéner ceux qui ne partagent peut-être pas notre joie du moment", ont développé les auteurs des travaux.