La pollution, même à de faibles niveaux, n’est pas seulement néfaste pour nos poumons ou notre santé cardiovasculaire : elle serait aussi un facteur de risque de maladies neurodégénératives.
C’est ce que met en lumière une étude menée par des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’université de Rennes 1 et de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) à l’Irset. Dans The Lancet Planetary Health, ils démontrent l’impact sur la santé et les performances cognitives de trois polluants liés au trafic routier : les particules fines de diamètre inférieur à 2,5 microns (PM2.5), le dioxyde d’azote (NO2) et le carbone suie.
La pollution, facteur de risque de la démence
Ces travaux ne sont pas les premiers à mettre en lien la pollution atmosphérique et les pathologies neurodégénératives. Depuis quelques années, la pollution de l’air est ainsi reconnue comme un facteur de risque de la démence. Mais jusqu’à présent, aucune étude ne s’était intéressée simultanément à plusieurs types de polluants et à leurs potentiels effets respectifs sur les différents domaines de la cognition.
C’est pourquoi les chercheurs ont utilisé les données de plus de 61 000 participants de la cohorte épidémiologique Constances, âgés de 45 ans et plus.
Les participants se sont pliés à une série de tests mesurant leurs performances cognitives dans trois grands domaines de la cognition : la mémoire, la fluidité d’expression orale et la capacité à prendre des décisions (ce que l’on appelle les fonctions exécutives). Un score des performances cognitives a ensuite été établi pour chacun des tests.
Pour mesurer l’exposition de chaque participant à la pollution, l’équipe de recherche a utilisé des cartes dites "d’exposition" qui estiment la concentration des trois polluants à l’adresse du domicile en prenant en compte plusieurs variables comme la densité du trafic routier et la proximité du domicile aux routes.
Une diminution jusqu’à 5 % des performances cognitives
En croisant les résultats des tests cognitifs avec le niveau d’exposition aux trois polluants atmosphériques, les chercheurs ont constaté qu’une exposition à de grandes concentrations des trois polluants était significativement associée à un niveau plus bas niveau de performances dans les trois domaines cognitifs étudiés. Pour les participants les plus exposés, une différence allant de 1 à près de 5 % du score des performances cognitives par rapport aux participants moins exposés a même été constatée.
"Les capacités les plus impactées sont la fluence verbale et les fonctions exécutives, détaille dans un communiqué Bénédicte Jacquemin, la chercheuse Inserm qui a dirigé ces travaux. Le dioxyde d’azote et les particules PM2,5 impactent d’avantage la fluence verbale, tandis que le carbone suie a un plus grand impact sur les fonctions exécutives."
"La prochaine étape de nos recherches consiste à observer l’évolution dans le temps des fonctions cognitives de ces adultes, afin de voir si l’exposition à la pollution est aussi associée à une baisse du fonctionnement cognitif avec le temps, baisse qui peut refléter les premiers signes de démences, tant de la maladie d’Alzheimer que d’autres formes de démences du sujet âgé", conclut la chercheuse.