Commandé en septembre 2021, le ministère des Solidarités et de la Santé a reçu le rapport "Chemsex" du Pr Amine Benyamina, chef du service de psychiatrie et d'addictologie de l'Hôpital Paul-Brousse (AP-HP) et président de la Fédération française d'addictologie. Il établit un état des lieux sur cette pratique en plein essor et formule des recommandations pour lutter contre.
Nouveaux produits de synthèse
Le chemsex correspond à la consommation de substances psychoactives lors de rapports sexuels, le but étant d’initier, faciliter, prolonger ou améliorer ces derniers à travers les différents effets des molécules consommées. Cette pratique s’est développée en France à partir des années 2010, en lien avec l’arrivée de nouveaux produits de synthèse appartenant principalement à la famille des cathinones. "Il s’agit avant tout des cathinones de synthèse, mais également du GHB ou de son précurseur, le GBL, et, dans une moindre mesure aujourd’hui, de la cocaïne, de la MDMA, de la kétamine et la méthamphétamine", précise le rapport.
A ce jour, peu de données existent pour quantifier l’ampleur du phénomène. "Si la quantification de la prévalence du Chemsex en population générale semble toujours complexe, ce dernier pourrait concerner environ 20% des hommes ayant des rapports avec des hommes, soit potentiellement 100 000 à 200 000 personnes en France", peut-on lire dans le rapport. "Il semble en outre y avoir des signes de diffusion dans d’autres sous-populations, dont le nombre exact est encore mal évalué", précisent les experts.
Addiction et infections
La pratique du chemsex peut s’avérer très dangereuse pour la santé, voire mortelle. Les soignants lui attribuent différentes problématiques sanitaires, notamment addictives, infectieuses ou mentales. "Si les volets classiques d'une stratégie de santé publique doivent structurer une politique en direction des personnes pratiquant le Chemsex, elle doit être élaborée et mise en œuvre en tenant compte des particularités des personnes concernées, sans moralisme ni discrimination", estime Amine Benyamina. Son rapport recommande ainsi notamment de repérer les personnes concernées, d’informer les usagers et les acteurs ainsi que de former les soignants.
"Compte tenu de la grande spécificité du sujet, une coordination nationale du suivi des interventions de terrain parait nécessaire dans un premier temps", conclut Amine Benyamina. "Le présent rapport révèle aussi la relative faiblesse des données épidémiologiques, interventionnelles et d'addictovigilance. Il est nécessaire de mettre en place des programmes de recherche pour documenter le phénomène et valider les stratégies d'intervention".