Après le cancer et les maladies cardiovasculaires, les suicides représentent la troisième cause de décès chez les agriculteurs exploitants en activité. C'est le constat dressé par l’Institut de veille sanitaire (InVS), qui publie ce jeudi les résultats de la première analyse de mortalité par suicide portant sur des données nationales recueillies dans cette population. Cette étude inédite s’inscrit dans le plan de prévention du suicide dans le monde agricole, annoncé par le ministère de l’Agriculture en mars 2011 et dont la mise en œuvre a été confiée à la Mutualité sociale agricole (MSA).
485 suicides d'agriculteurs en trois ans
La population étudiée est constituée de chefs d’exploitations agricoles et de leurs conjoints collaborateurs, en activité professionnelle pendant au moins une des trois années d’étude : 2007, 2008 ou 2009. En moyenne, cela représente environ 500 000 personnes chaque année dont 68 % d’hommes et 32 % de femmes.
Durant les trois années étudiées, 2 769 décès ont été observés chez les hommes et 997 chez les femmes. Parmi ces décès, 417 suicides chez les hommes et 68 chez les femmes ont été enregistrés.
Les agriculteurs et les filières d’élevage bovin sont les plus touchés
Un excès significatif de suicides a été observé chez les hommes exploitants agricoles à partir de 2008, comparativement à la population générale de même âge. Cette surmortalité par suicide est de 28 % en 2008 et de 22 % en 2009. L’excès est notamment marqué chez les hommes entre 45 et 64 ans et plus particulièrement dans les filières d’élevage bovins-lait et bovins-viande qui présentent en 2008 et 2009 les surmortalités par suicide les plus élevées. « Ces observations coïncident avec la temporalité des problèmes financiers rencontrés dans ces secteurs sur la période d’étude », souligne l'InVS.
Selon une étude britannique publiée dans le BMJ, la crise économique depuis 2008 pourrait être à l'origine d'une augmentation du taux de suicide en Europe, en Amérique du Nord et du Sud. En 2009, ces régions enregistrent une hausse moyenne de 37 % du taux de chômage et une baisse de 3% du PIB par habitant, et une hausse de 3,3% du taux de suicide chez les hommes.
Les agriculteurs ont aussi un risque accru de cancer.
D’après les données scientifiques publiées au cours des 30 dernières années recensées par l'Inserm dans un rapport, il semble exister une association positive entre une exposition professionnelle à des pesticides et certaines pathologies chez l’adulte.
D'une part, une augmentation du risque de cancer de la prostate existe chez les agriculteurs, les ouvriers d’usines de production de pesticides et les populations rurales (entre 12 et 28 % selon les populations). D'autre part, « pour les autres cancers, un excès de risque de leucémies ne peut être écarté », soulignait ce rapport dévoilé en juin.