C’est une révolution à l’échelle de la science, et un bouleversement à l’échelle individuelle. Un homme de 36 ans, entièrement paralysé à cause de la maladie de Charcot, a réussi à communiquer grâce à deux électrodes implantées dans son cerveau. Dans Nature Communication, les chercheurs expliquent comment ils sont parvenus à aider cet homme, originaire d’Allemagne, à s’exprimer.
Une paralysie totale
Pendant deux ans, l’équipe a travaillé auprès de ce trentenaire atteint de la maladie de Charcot, une pathologie neurodégénérative progressive dans laquelle les gens perdent la capacité de bouger et de parler. Il souffre également du Locked-In Syndrome (LIS), qui l’empêche de parler et de bouger, mais pas de penser ni d’entendre. Sa paralysie est très importante, par exemple, il ne peut pas cligner ses yeux. "Cette étude répond à une question de longue date : savoir si les personnes atteintes du Locked-In syndrome complet (CLIS), qui ont perdu tout contrôle musculaire volontaire, y compris le mouvement des yeux ou de la bouche, perdent également la capacité cérébrale à générer des commandes de communication", explique Jonas Zimmermann, PhD, neuroscientifique au Wyss Center à Genève, et co-auteur de cette étude.
Un système de communication cerveau - ordinateur
Les chercheurs ont implanté deux réseaux de micro-électrodes dans le cortex moteur du cerveau de cet homme. Chacun d’eux mesure 3,2 mm de côté et comporte 64 électrodes en forme d’aiguille, capables d’enregistrer les signaux neuronaux. Ceux-ci sont captés par les microélectrodes implantées et sont décodés par une interface en temps réel. En parallèle, un programme automatique d'orthographe lit les lettres de l'alphabet à haute voix. En utilisant le neurofeedback auditif, le participant est capable de choisir "oui" ou "non" pour confirmer ou rejeter la lettre, formant finalement des mots et des phrases entières.
Plus de 100 jours d'adaptation
Il a fallu du temps pour que le patient parvienne à maîtriser ce nouvel outil. Au bout de 106 jours, il a réussi à sélectionner des lettres, puis à former des phrases. Il lui faut environ une minute pour choisir une lettre. Le 247e jour, il dit à l’équipe médicale "Boys, it works so effortlessly", soit "les garçons, cela fonctionne sans effort". Le 461e, c’est à son fils de quatre ans qu’il s’adresse : il lui propose de regarder un dessin animé Disney ensemble. "Cette technique, qui profite à un patient et à sa famille, est un excellent exemple de la façon dont les avancées technologiques dans le domaine de la communication cerveau - ordinateur peuvent être traduites pour avoir un impact direct", se félicitent les auteurs de l’étude.