A partir du 16 octobre, le bon fonctionnement des maternités risque d'être perturbé. La CFTC santé-sociaux, dans un communiqué publié ce mercredi, appelle les sages-femmes à faire grève mercredi prochain, et à commencer le même jour un sit-in illimité devant le ministère de la Santé, pour réclamer notamment l'accès au statut de praticien hospitalier (PH). « Ce serait une reconnaissance très claire de notre statut médical de la part des pouvoirs publics », confie Caroline Raquin, présidente de l'Organisation nationale syndicats sages-femmes (ONSSF), contactée par pourquoidocteur.
En effet, même si ces dernières exercent une profession médicale, elles ont depuis toujours le statut de « paramédicale ». Cette absence de reconnaissance par les autorités se ressent également sur la rémunération de ces professionnelles. « Le statut de la fonction publique hospitalière nous considère comme des bac+3, mais nous sommes payées comme des bac+2 et demi, avec même pas le salaire de base qui correspond à un niveau licence. Le pire, c'est qu'en réalité, nous avons un bac + 5, avec une première année de médecine et une formation de quatre ans qui suit pour devenir sage-femme », explique Caroline Raquin.
Les sages-femmes pratiquent tous les actes d'un suivi de grossesse normal
Mais ce cri de colère, ce n'est pas qu'une histoire de rémunération. Car en milieu hospitalier, les sages-femmes dépendent, pour le moment, entièrement de leur chef de service concernant la politique de suivi de grossesse des femmes enceintes à appliquer.
Or, en pratique, lors des grossesses sans complications, les sages-femmes exécutent tous les actes que font les médecins hospitaliers spécialistes de la grossesse (échographie, préparation à l'accouchement, monitoring...).
Ecoutez Caroline Raquin, présidente de l'ONSSF : « A la maternité où je suis, les sages-femmes font de tout. Des consultations, des échographies...»
Mais malheureusement, aujourd'hui encore, la présidente confie que de nombreuses femmes enceintes ne connaissent même pas le champ de compétences élargi des sages femmes. C'est pourquoi leur revendication principale consiste à être placées au même niveau que les médecins dans les hôpitaux, en tout cas lors d'un suivi des grossesse normales. Caroline Raquin indique d'ailleurs que les sages-femmes sont soutenues par la plupart des chefs de service dans les hôpitaux, mais aussi depuis 2010, par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français qui a pris clairement position en faveur de leur accès au statut de praticien hospitalier.
Ecoutez Caroline Raquin, présidente de l'ONSSF : « Lorsqu'on demande à une femme si elle souhaite une sage-femme ou un médecin. Bien souvent la réponse c'est : ah bon, les sages-femmes font des consultations...»
Le suivi d'une sage-femme : un coût réduit pour la femme enceinte et la Sécu
Par ailleurs, pour Caroline Raquin, faire connaître davantage le suivi de grossesse par les sages-femmes, c'est aussi assurer aux femmes enceintes un moindre coût. Car, ces professionnelles sont moins chères que les médecins. « Les foyers les plus modestes pourraient ainsi faire des économies », reconnaît la présidente.
« Investir dans les sages-femmes et les faire accéder au statut de PH permettrait également à la Sécurité sociale de faire des économies non négligeables », rajoute-t-elle. Et cet argument pourrait bien faire mouche auprès de Marisol Touraine, ministre de la Santé, en cette période où tous les comptes de l'Assurance maladie sont dans le rouge.
Ecoutez Caroline Raquin, présidente de l'ONSSF : « Si le ministère de la Santé investissait sur les sages-femmes, les économies seraient trois fois supérieures à l'investissement de départ. Le gain attendu se chiffrerait en millions...»
Un grève illimitée pourrait perturber fortement les maternités
Quoi qu'il en soit, ces professionnelles de santé ne comptent rien lâcher face à la ministre, qui d'après Caroline Raquin, a reçu toutes les professions médicales depuis sa prise de fonction, sauf celle des sages-femmes. C'est pourquoi, en plus du sit-in, la présidente annonce d'ores et déjà que la grève sera le meilleure moyen de se faire entendre.
En effet, si cette dernière est reconduite et devient illimitée, le fonctionnement des maternités hospitalières se verrait largement perturbé. Un scénario que Marisol Touraine cherchera à n'en pas douter à éviter à tout prix, à cinq mois des élections municipales...
Ecoutez Caroline Raquin, présidente de l'ONSSF : « Si on passe en restriction et service minimum, il ne restera des sages-femmes qu'en salle d'accouchement et en urgence. Dans tous les autres services, il n'y en aura plus...»