On parle peu de l'importance du fer dans notre corps, mais sans lui, la vie serait impossible. Il est vital pour nos cellules et agit comme catalyseur de la plupart des réactions chimiques qui s'y produisent. Grâce à lui, nous pouvons oxygéner notre sang en respirant, car il fixe l'oxygène que nous absorbons à l'hémoglobine des globules rouges.
Une santé de fer ? Pas vraiment...
Dans le cas de l'hémochromatose, l'organisme absorbe tout le fer et ne peut éliminer l'excédent. Alors que quelques grammes seulement sont nécessaires, certains en stockent jusqu'à 1 kilogramme. Le fer est réparti dans plusieurs organes, dont le cerveau, le cœur et surtout le foie, entraînant à terme des maladies graves, un diabète, une cirrhose ou un cancer.
Mais les symptômes de l'hémochromatose peuvent être anodins, et ne pas attirer l'attention sur la surcharge en fer : des rhumatismes, des troubles sexuels, une dépression, l'ostéoporose, une fatigue inexpliquée... Une véritable encyclopédie médicale dans laquelle les médecins se perdent, seule explication de la discordance entre le nombre de personnes touchées et la très faible notoriété de cette maladie. En effet, il faut en moyenne 10 ans pour arriver à ce diagnostic simple : dans la grande majorité des cas, une simple prise de sang suffit.
Une maladie génétique
L'hémochromatose nous vient des Celtes. Il y a quelque 4.000 ans, quelque part dans le nord de l'Europe, un enfant celte, par pur hasard, a été victime d'une mutation génétique lors de sa conception. Aujourd'hui, les descendants de cet enfant portent cette mutation dans leurs gènes. Inconnue dans les populations noire et maghrébine, peu répandue en Espagne et en Italie, l'hémochromatose est fréquente dans les terres celtiques, c'est-à-dire en Irlande et sur notre territoire breton.
Comme au temps de Molière
La plus fréquente des maladies génétiques est aussi la seule maladie que l’on sache soigner. Son traitement est une autre originalité de la maladie et emprunte le traitement de prédilection des médecins de Molière : la saignée. Aujourd'hui, cette thérapeutique traite parfaitement 200.000 personnes atteintes. Quelques centaines de millilitres de sang doivent être prélevées régulièrement pour réduire la quantité de fer dans le corps. Trois à quatre saignées par semaine (chacune équivalant à un don de sang) pendant plusieurs mois permettent d'éliminer les globules rouges très riches en fer : un prélèvement de 500 ml de sang équivaut à une perte de 250 mg de fer.
Pour fabriquer de nouveaux globules rouges, le corps a besoin de molécules de fer. Il va donc les extraire de la surcharge déposée sur les différents organes. Petit à petit, on peut espacer les saignées, mais le bien-être retrouvé rend le geste presque agréable ! Si l'hémochromatose est détectée à temps, un traitement efficace et moderne est possible.
C'est au Pr Axel Kahn et à ses collaborateurs de l'Institut Cochin à Paris que nous devons une découverte fondamentale pour l'avenir : celle d’une hormone recherchée depuis plus de 40 ans. L'hepcidine est au fer ce que l'insuline est au sucre. Ce régulateur détermine la pénétration du fer au niveau de notre intestin. La découverte de l'hepcidine ouvre une nouvelle fenêtre sur les maladies liées au fer. À court terme, on devrait disposer d’un test pour doser cette hepcidine dans le sang, pour dans un premier temps poser un diagnostic. Quant aux bénéfices thérapeutiques à long terme, (on pourrait rêver que les accélérateurs ou les freins à l'hepcidine soient plus high-tech que la saignée) ils devraient être considérables.
Pour en savoir plus, le site de l’Association Hémochromatose France : www.hemochromatose.fr