En médecine, les très bonnes nouvelles ne sont pas fréquentes. Celle qui nous vient des États-Unis est exceptionnelle. Le cancer du rectum est un cancer redoutable. Dans un essai clinique mené sur le Dostarlimab, l’un de ces nouveaux médicaments qui changent le pronostic de certains cancers, la tumeur avait totalement disparu au bout de 6 mois. Les résultats ont été publiés le 5 juin dernier, dans le New England of Medicine, revue américaine de référence.
Un résultat exceptionnel
Tous les patients… Un résultat exceptionnel. Il faut retenir ce taux de 100 % comme une des grandes nouvelles de ces derniers mois. L’une des responsables de l’étude a même déclaré : « Nous n’avons, de mémoire de cancérologues, jamais obtenu un tel résultat dans l’histoire de notre spécialité ».
Un résultat exceptionnel, en effet, mais qu’il faut tempérer un peu. D’abord, il ne s’agit que de 12 patients, ce qui est encore trop peu pour affirmer la solidité de ce traitement. D’autre part, il s’agit d’une forme de cancer du rectum assez rare, qui ne représente qu’un faible pourcentage de malades. On estime à environ 43 500 le nombre de nouveaux cas de cancers colorectaux (côlon ou rectum) en 2018 en France, dont un peu plus de la moitié chez l'homme. Ce cancer survient généralement après 50 ans. Il a un taux de survie à 5 ans, tous stades confondus, de 57 %.
Enfin, on ne peut pas parler de guérison dans les cancers digestifs avant 5 ans en théorie, et dans cette étude, on n’en est qu’à 6 à 25 mois de rémission… Donc cette réponse complète sur les 12 premiers patients consécutifs, c’est certes du jamais vu, mais il ne faut pas encore parler de survie, mais de non-utilisation d’un traitement lourd (chimiothérapie + radiothérapie + chirurgie), ce qui est un progrès considérable pour la qualité de vie de ces malades. Il est difficile d’expliquer toutes ces notions au grand public, et on préférera parler de « rémission » complète plutôt que « guérison ».
Voie nouvelle
Toutefois, réveiller l’immunité d’un patient contre la tumeur pour la détruire « naturellement », c’est la formidable voie nouvelle suivie depuis 15 ans par les oncologues, avec les médicaments de l’immunologie. Avec beaucoup plus de victoires que de défaites. Et c’est cela qu’il faut retenir : l’espoir. Un mot qui ne fait pas partie du vocabulaire habituel de ces médecins. Aussi, ne boudons pas l’enthousiasme peut-être un peu excessif de ces chercheurs depuis quelques jours. C’est au nom de cet espoir que l’on excusera le déferlement médiatique un peu disproportionné.