Vingt après une première publication phare sur le sujet, l’OMS tire à nouveau la sonnette d’alarme dans son nouveau « Rapport mondial sur la santé mentale », publié vendredi 17 juin.
1 personne sur 8 souffre d’un trouble mental
« La santé mentale est bien autre chose que l’absence de pathologie : elle fait partie intégrante de notre santé et de notre bien-être individuels et collectifs », introduit le directeur général de l’agence sanitaire de l’ONU, Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui rappelle : « Il n’y a pas de santé sans santé mentale. »
En 2019, année de l'enquête, quelque 970 millions d’êtres humains, avec une courte majorité de femmes (52,4 %), souffraient d’un trouble psychique (contre 450 millions il y a vingt ans, sur quelque 6 milliards d'âmes). Une proportion qui représente 13 % de la population du globe, soit près d’une personne sur huit. La situation est d’autant plus inquiétante dans les zones ayant connu un conflit ces dix dernières années, avec une personne sur cinq affectée.
Parmi les affres les plus répandus : les troubles anxieux (31 % du total des personnes souffrant de problèmes psychiques) et dépressifs (28,9 %). Les gens atteints de troubles psychiques sévères (comme la bipolarité ou la schizophrénie, qui « touche 1 adulte sur 200 ») meurent en moyenne « 10 à 20 ans plus tôt que la population générale », rappelle l’OMS. Par ailleurs, le rapport précise qu’en 2019, les suicides, « une des premières causes de décès chez les jeunes », représentaient déjà « plus d’un décès sur 100 ».
Sans surprise, le Covid-19 a aggravé la situation, perturbant les services de santé mentale et aggravant le déficit de traitement des troubles psychiques. L’organisation estime ainsi que les taux de dépression et d’anxiété ont bondi de 25 % pendant la première année de pandémie, en 2020. Et pour cause, la crise sanitaire a charrié son lot de complications : stress lié aux confinements et aux mesures de restriction, conséquences économiques et sociales (perte d’emploi, précarité financière...).
L’accès aux soins reste très inégal
Faute de soins et d’accompagnement des personnes atteintes de troubles mentaux, « des millions de personnes dans le monde souffrent en silence, voient leurs droits humains bafoués ou sont pénalisées dans leur vie quotidienne », écrit l’OMS.
L’agence pointe notamment le sous-financement « systématique » consacré aux soins de santé psychique, l’argent étant plutôt réservé aux autres problèmes de santé. « En moyenne, moins de 2 % des budgets nationaux alloués aux soins de santé́ vont à la santé mentale [...] Près de la moitié de la population mondiale vit dans des pays où l’on compte à peine un psychiatre pour 200 000 personnes. »
Beaucoup ne cherchent même pas à demander de l’aide, du fait de la piètre qualité des services, d’une méconnaissance de la santé mentale, mais également de la stigmatisation et de la discrimination dont elles sont victimes. « La majorité des personnes souffrant de troubles mentaux ne sont tout simplement pas traitées », selon l’OMS.
A noter que les écarts entre pays riches et pauvres restent abyssaux. Par exemple, 70% des personnes souffrant de psychoses bénéficient d'un traitement dans les nations développées, contre 12 % dans celles à faible revenu.
Il est nécessaire d’investir dans la prévention
En 2013, les 194 Etats Membres de l’OMS avaient adopté́ le Plan d’action global pour la santé mentale 2013–2030, par lequel ils s’engageaient à améliorer la santé mentale par de nombreux moyens. Aujourd’hui, les auteurs du rapport plaident en premier lieu pour des « financements appropriés » : les pays doivent « étoffer leurs effectifs de spécialistes » de la santé mentale, renforcer drastiquement les « compétences en psychiatrie » des professionnels de santé, ainsi qu’abandonner la prise en charge de troubles psychiatriques sévères en hôpital « au profit de services de santé mentale communautaires ».
De même, l’OMS appelle à ce que « chacun d’entre nous améliore ses aptitudes et ses compétences pour comprendre et prendre soin de sa santé mentale », mais également à « mettre en œuvre des programmes en milieu scolaire ». Avec l’objectif, à terme, de repérer et de prévenir plus efficacement les troubles mentaux, et de mieux suivre et accompagner celles et ceux qui sont touchés. « Individus, gouvernants, prestataires de soins, organisations non gouvernementales, universitaires, société́ civile et autres parties prenantes, tous ont un rôle à jouer », conclut l’OMS.