Les Français n'ont pas peur du don d'organes du vivant, ils ne connaissent pas cette forme de greffe. « De nombreux Français restent encore persuadés que seul le prélèvement d'un rein sur une personne décédé est possible », confie Yvanie Caillé, directrice générale de Renaloo, une association de patients et de proches concernés par les maladies des reins. Alors, à l'occasion de la « Journée mondiale du don d’organes et de la greffe » qui se déroule ce jeudi, l'Agence de biomédecine et les associations de patients se mobilisent pour rappeler notamment que le don de rein à partir d'un donneur vivant doit devenir une solution envisagée au même titre que la greffe à partir de donneur décédé. Dans le cadre du plan greffe 2012-2016, l'Agence a lancé le 12 octobre 2013, une campagne d’information grand public baptisée « un don en moi, pour la greffe rénale à partir de donneur vivant », en collaboration avec les professionnels de santé et les associations.
Ecoutez Yvanie Caillé, directrice générale de Renaloo : « Aujourd'hui, 12 % des greffes de reins en France sont faites à partir de donneurs vivants. Dans beaucoup de pays d'Europe, ce taux atteint 30, 35, voir 40 %.
Mais pour inciter les citoyens à donner, la campagne de l'Agence de la biomédecine ne s'adresse pas qu'aux donneurs potentiels. « L'implication toujours plus forte des établissements de santé et des médecins est indispensable pour obtenir encore de meilleurs résultats », confirme Yvanie Caillé. Dans toute l'Union européenne, 61 000 personnes sont en attente d'un don d'organes, dont 12 000 en France. Chaque année dans l'Hexagone, 200 personnes meurent en attente d'une greffe.
Ecoutez Yvanie Caillé : « Les établissements de santé doivent mettre les moyens dans cette activité qui est lourde pour les équipes médicales...»
En 2012, l'activité de greffe rénale a certes passé le cap des 3 000 greffes annuelles en France, mais de nombreux malades souffrant d'insuffisance rénale terminale sont toujours en attente d'une greffe de rein. En effet, la même année, 13 333 malades étaient inscrits sur la liste nationale d'attente.
La greffe à partir de donneur vivant, qui reste trop peu connue du grand public, présente pourtant de réels bénéfices pour le receveur, mais plus surprenant encore, pour le donneur...
Les bénéfices de la greffe rénale à partir d’un donneur vivant
Le traitement de l’insuffisance rénale terminale repose habituellement sur la dialyse et la greffe de rein. Cette dernière, lorsqu’elle est possible, est le meilleur traitement de l’insuffisance rénale terminale car le rein greffé permet le plus souvent d’assurer normalement toutes les fonctions du rein. Cette thérapeutique améliore ainsi l’espérance et la qualité de vie des patients.
Face à un malade, les médecins estiment aujourd'hui que la greffe rénale à partir d'un donneur vivant reste donc la meilleure option possible. Elle permet d'une part, un accès à la greffe dans des délais contrôlables. Il faut, en effet, souvent attendre plusieurs année avant de pouvoir bénéficier d’une greffe de rein à partir d’un donneur décédé. En outre, pour certains malades qui possèdent un groupe sanguin rare ou bien des anticorps anti-HLA, la greffe à partir d’un donneur vivant peut être la seule façon possible d’obtenir un greffon compatible dans un délai raisonnable. D'autre part, c'est la solution rêvée pour de nombreux patients confrontés au quotidien à la dialyse.
Par ailleurs, ce type de greffe peut être programmée à l’avance en fonction de la période la plus favorable pour le malade, des disponibilités du donneur et de l’organisation de l’équipe médicale. Enfin, un greffon de donneur vivant fonctionne en général très bien et surtout plus longtemps.
A l'heure actuelle, le nombre estimé de porteurs de greffon fonctionnel de rein en France est de 33 298 au 31 décembre 2012. Pour la cohorte 1993-2009, 10 ans après une greffe, 77 % des greffons prélevés sur donneur vivant continuent de fonctionner, contre 63 % pour les greffes à partir de donneur décédé.
Donner un rein à un proche ne diminue pas la qualité de vie du donneur
Selon une enquête réalisée en 2011 par l'Agence de la biomédecine, 98 % des donneurs vivants seraient prêts à refaire ce geste et 95 % d’entre eux conseilleraient cette solution à une personne qui leur demanderait leur avis.
En outre, plusieurs années après l’acte chirurgical, les donneurs interrogés sont en excellente santé physique, comparé à la population générale au même âge, et même en meilleure santé chez les donneurs les plus âgés. C'est le suivi annuel médical obligatoire du donneur qui permet de veiller à ce qu’il demeure en bonne santé. Réalisé par l’équipe de greffe ou par le médecin traitant, il comporte au minimum les examens qui évaluent la fonction rénale : un contrôle de la pression artérielle, un dosage de la créatininémie, et la recherche d’albumine dans les urines.
Concernant leur état mental, les scores des donneurs sont généralement très proches de ceux des personnes de même âge et de même sexe de la population générale.
Pourtant, comme pour tout acte médico-chirurgical, le prélèvement de rein comporte un risque qui concerne l'anesthésie, l’opération chirurgicale et les suites opératoires immédiates ou lointaines. Selon les données internationales, on observe environ 3 cas de décès pour 310 000 personnes prélevées. En France, depuis la mise en place du registre de suivi des donneurs vivants de rein en 2004, aucun cas de décès de donneur vivant de rein n'est à déplorer.