C’est un mal que les scientifiques ont du mal à comprendre. Depuis le printemps, des enfants sont atteints d’une mystérieuse hépatite aiguë, sans que les médecins n’arrivent à trouver son origine. Selon le dernier point Santé publique France publié le 30 juin, 920 cas probables ont été rapportés par 33 pays au 22 juin, dont huit en France.
Des symptômes variés
L’hépatite est une inflammation du foie : elle se manifeste par des douleurs abdominales, une jaunisse, des nausées, des vomissements, des urines foncées et des selles pâles, une perte d’appétit, de la fièvre ou encore de la fatigue. Chez certains enfants, la maladie évolue vite et peut provoquer une insuffisance hépatique en quelques jours. Parmi les cas rapportés, environ 10% ont eu des lésions sévères qui ont nécessité une greffe de foie. Si les symptômes semblent clairs et similaires à ceux des autres hépatites, leur origine est toujours incomprise.
Un adénovirus ou la Covid-19 ?
"Aujourd'hui, il faut le dire, personne n'y voit clair", affirme Bruno Lina, virologue aux Hospices civils de Lyon, dans une interview au Parisien. La première hypothèse des scientifiques a été la Covid-19 : certains enfants atteints de l’hépatite étaient infectés par le virus. Mais le lien entre les deux pathologies n’était pas clair. Pour le virologue, "le Sars-CoV-2 seul n'est pas le responsable".
La seconde piste était celle d’un adénovirus : des virus à ADN sans enveloppe. "L’adénovirus 41, qui a été identifié dans plusieurs des cas d’hépatites ces dernières semaines, est déjà bien connu comme cause de gastroentérite chez les enfants, explique l’Inserm. De manière générale, les cellules cibles des adénovirus se situent principalement dans la conjonctive et les tractus digestif, respiratoire et urinaire." L’adénovirus 40 a aussi été repéré chez certains enfants. Selon Bruno Lina, 52,4% des enfants atteints de l’hépatite avaient des traces de l’un ou l’autre de ces adénovirus dans leurs selles. Mais pour lui, il est difficile de les considérer comme une cause. D’abord, ces virus sont souvent responsables des angines et des gastroentérites, or un dépistage n’est pas systématique chez les personnes ayant des symptômes. "On ne sait pas quel est le niveau de circulation silencieuse de ces virus chez les très jeunes", conclut ce spécialiste. La proportion pourrait être plus importante que 52,4%, surtout que des traces du virus peuvent rester très longtemps dans les selles. Enfin, le chercheur précise que "les cas d’hépatites liées aux adénovirus de types 40 et 41 sont exceptionnels, à part chez les enfants très immunodéprimés."
Des causes qui pourraient rester inconnues
Pour Bruno Lina, il est possible que "plusieurs facteurs associés d’ordre toxicologique, environnemental et infectieux" soient responsables de l’hépatite. "Il peut s'agir d'un problème avec de l'eau ou un aliment", ajoute-t-il. En réalité, il estime qu’il est possible qu’on ne trouve jamais la cause de la maladie. "Ce signal est en train de disparaître, les cas de diminuer", constate le scientifique, et avec eux les chances de comprendre leur origine. "Il n’est pas encore clair s’il y a réellement eu une augmentation des cas d’hépatite pédiatrique ou une augmentation de la prise de conscience de cas qui n’étaient auparavant pas ou peu détectés et qui sont aujourd’hui mieux identifiés grâce à une surveillance renforcée", indiquait l’Inserm début mai. Deux mois plus tard, les scientifiques ne sont pas plus avancés.