Lors de la nouvelle émission politique de Jean-François Lemoine intitulée "
Pourquoi docteur - Les 41 mesures pour sauver les services d’urgence cet été, proposées par votre mission flash, ont été validées le 1er juillet par la Première ministre, Elisabeth Borne. Que ressort-il de ce travail ?
Y aura-t-il assez d’argent pour financer ces mesures ?
L’enjeu est tel, que je crois que voir nos recommandations par le biais financier est une erreur. Il faut plutôt les voir en se demandant : "si on ne le fait pas, qu’est-ce qui va se passer cet été ?"
Peut-on parler "d’une crise des urgences" ?
Depuis le début de cette émission et dans les médias, nous ne parlons que de "la crise des urgences". Or ce n’est pas que "la crise des urgences", car ces services ne sont que la partie émergée de l’iceberg, où se concentre toute la problématique de l’amont et de l’aval. Ce qu’il faut faire, c’est réformer l’ensemble du système de santé !
"Réformer l’ensemble du système de santé", n’est-ce pas une mission impossible ?
Non, ce n’est pas une mission impossible. La crise sanitaire de la Covid-19 nous a montré beaucoup de choses. Déjà, elle nous a enseigné que quand on se mettait à travailler ensemble, quand on faisait tomber les silos, on était capable de faire des choses extraordinaires. Mais à la sortie de la crise, on est malheureusement retombé dans les mêmes imbécilités qu’avant. Ce point décourage énormément les personnes qui exercent à l’hôpital, car elles ont vu qu’elles pouvaient travailler autrement et facilement, sans contrainte (et que ce n’est plus possible aujourd’hui, NDLR).
Qu’entendez-vous par "réformer l’ensemble de système de santé" ?
Deux points sont importants. Le premier, c’est qu’on arrête de concevoir la Santé uniquement sous le prisme des soins, car c’est aussi de la prévention, du dépistage et des suites de prise en charge.
L’autre point qui est important, c’est que depuis les années 50, on construit notre système de santé uniquement sur l’offre – on n'arrête d’ailleurs pas de parler de « l’offre de soins ». Or, l’offre de soins crée de la concurrence, quel que soit le secteur, y compris dans les hôpitaux, où l’on évoque d’ailleurs des « parts de marché », ce qui m’écorche les oreilles. Il faut qu’on parte d’un système qui se concentre enfin sur le besoin de santé des patients, et qui soit plus tourné vers la qualité.
Que faire au niveau des urgences, qui reçoivent beaucoup de patients qui ne devraient pas y être ?
A nous, les soignants, ce système nous paraît simple, parce qu’on est dedans. Mais les gens ne s’y retrouvent pas, car c’est une organisation compliquée pour les Français. Lorsqu’ils ont mal à la poitrine ou à la tête, ils ne savent pas qui appeler. Donc ils ont besoin d’un guide, ou d’un logiciel sur leur téléphone, qui leur expliquerait quoi faire dans quelle situation.
La régulation est aussi essentielle, pas pour empêcher les gens de venir, bien sûr, mais pour les mettre dans le meilleur parcours de soins. Pour cela, nous avons les médecins généralistes, le SAMU et le SAS, qui est en train de se développer.