"On a constaté que l'intensité de la douleur fluctue au cours de la journée dans certaines conditions expérimentales et cliniques, mais les mécanismes qui sous-tendent ces fluctuations sont inconnus", ont indiqué des chercheurs de l’université de Lyon. Dans le cadre d’une étude publiée dans la revue Brain, ils ont découvert que, comme de multiples fonctions de l’organisme, l’intensité de la douleur était régulée par l’horloge circadienne interne.
Des conditions d’isolation en laboratoire
Pour parvenir à cette conclusion, les scientifiques ont recruté 12 jeunes adultes et les ont suivis dans des conditions d’isolation temporelle et de constante routine en laboratoire. Pendant 34 heures, les participants ont dû rester éveillés. Ils n’avaient pas de repas à des heures fixes et aucune notion du temps. Les patients consommaient une collation chaque heure. Dans la pièce, la température et la faible luminosité étaient constantes. Durant l’expérience, les volontaires ne changeaient pas de posture, ils étaient en position semi-allongée et ne réalisaient aucun effort.
En outre, les auteurs ont exposé l’avant-bras des jeunes adultes à une source de chaleur toutes les deux heures. Les personnes devaient indiquer lorsque cette zone corporelle devenait douloureuse durant la hausse de la température et évaluer l’intensité de la douleur sur une échelle de 1 à 10.
La perception douloureuse est rythmique
D’après les résultats, la sensibilité à la douleur est rythmique sur 24 heures et fortement contrôlée par l’horloge circadienne interne. Cette sensibilité augmentait de façon linéaire avec la dette de sommeil, c’est-à-dire le manque de sommeil. "Il est souvent dit que le sommeil a une action antalgique. Mais en modélisant mathématiquement nos résultats, nous montrons que l’horloge interne est responsable de 80 % de la variation de la sensation douloureuse au cours de 24 heures, contre seulement 20 % pour le sommeil", a expliqué, Claude Gronfier du Centre de recherche en neurosciences de Lyon, dans un communiqué de l’Inserm.
Un pic entre 3 et 4 heures du matin
Selon l’équipe, l’intensité de la douleur oscille sur 24 heures. Elle est plus intense la nuit, plus précisément entre 3 et 4 heures du matin, et baisse dans l’après-midi, autour de 15 et 16 heures. "On ne sait pas pourquoi la sensibilité est maximale au milieu de la nuit. On peut penser que l’évolution a mis cela en place afin d’être réveillé rapidement en cas de contact douloureux et d’éviter une menace vitale. Pendant la journée, l’individu est conscient de l’environnement et plus facilement sujet aux blessures, ce signal d’alerte pourrait donc être moins nécessaire", a développé Claude Gronfier.