- Mettre sur le marché des applications de santé sans fournir de preuve de leur efficacité n'est pas illégal mais représente un risque potentiel pour le patients.
- Les applications évaluées par cette étude étaient toutes françaises.
En 2020, chaque jour, 250 nouvelles applications dans le domaine de la e-santé étaient mises en ligne, soit 90 000 dans l'année.
Téléchargées par de nombreux utilisateurs sur leur smartphone ou tablette pour les aider à faire plus de sport, manger sainement, adopter un mode de vie plus sain… elles ont connu un grand boom avec la pandémie de la Covid-19. Pour exemple, en mars 2021, 40,6 millions de Français se sont connectés à un site ou à une application de santé.
Qualité inconnue
Or il s’avère que "la grande majorité (des applications de e-santé) n'ont pas fait l'objet d'une validation clinique, leur qualité est inconnue et l'utilisateur ne sait pas si elles sont efficaces et sûres" , affirme une équipe scientifique de l’Institut national de l’e-santé dans une étude publiée dans le Journal of Medical Internet Research.
Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs ont créé et testé une outil de notation - basé sur 26 questions développées notamment sur des critères d'évaluation de la Haute autorité de santé (HAS) et les recommandations de la Société européenne d'oncologie médicale - sur 68 solutions de santé en ligne conçues pour le suivi de maladies comme les cancers, les pathologies cardiaques ou encore les douleurs chroniques.
Plus précisément, 30% d'entre elles étaient liées à la prise de médicaments et à la réduction de la toxicité du traitement, 23% concernaient la détection précoce de la maladie, 16% l'aide à la décision, 12% la prévention, 6% les indications thérapeutiques directes, 2% le triage des patients et 2% la surcharge des services d'urgence. Les applications d'oncologie (22 %) et les solutions de santé générale (23 %) étaient les plus représentées.
“Nous avons construit l'outil de notation avec des associations de patients et des experts en eSanté et l'avons soumis aux créateurs d'applications e-santé, qui ont évalué leurs applications, indiquent les scientifiques. Après avoir rempli les critères d'évaluation, leurs applications ont obtenu un score global et 4 catégories de sous-scores".
Ces critères évaluaient le type de solution et de domaine, la taille de la population ciblée par la solution, le niveau d'évaluation clinique et les informations sur le fournisseur.
Aucune étude
D’après cette étude, avant d'être commercialisées, seules 21% d'entre elles ont fait l'objet d'études randomisées (où on compare deux groupes, l'un avec un traitement et l'autre sans), correspondant à un bon niveau de fiabilité pour démontrer leur efficacité d'un point de vue scientifique.
15% des applis ont été évaluées avec des données de santé en vie réelle où on observe un groupe de patients avec cet outil mais on ne les compare pas avec les résultats de patients qui n'ont pas cet outil.
Et, surtout, 64% des applications, n'ont fait l'objet d'aucune étude clinique. "Ajouté à cela, le questionnaire a révélé que les éditeurs de ces applications n'avaient souvent pas de compétences médicales ou ne comprenaient pas de board scientifique", indique le Pr Fabrice Denis, président de l’Institut national de l’e-santé et co-auteur de l'étude.
Enjeu de sécurité
Or des applications défaillantes représentent un risque pour les patients:"il y a un véritable enjeu de sécurité et de confiance", regrette le Pr Fabrice Denis. "Si les algorithmes de ces applications ne sont pas validés et que les alertes ne se déclenchent pas à temps, cela peut représenter un risque pour le malade. On parle là de toxicité d'un médicament, de complications de maladies, d'infections ou d'erreurs d'orientation." Attention, donc, à ne pas trop faire confiance aux applications de e-santé et à toujours préférer l'avis d'un professionnel de santé en cas de doute.