L’odeur de tabac froid fait probablement partie des effluves les plus désagréables, en particulier pour les non-fumeurs. Appelée "fumée tertiaire", elle rassemble tous les composés du tabac, dont la nicotine, présents dans l’environnement après qu’une personne ait fumé. Il s'agit de l'odeur qui imprègne les vêtements, les rideaux ou encore les moquettes. Si elle est dégoûtante pour certains, elle peut aussi être dangereuse pour la santé. Des chercheurs du Berkeley Lab, de l’université de Californie, ont précédemment démontré que la fumée tertiaire fait partie des facteurs de risque pour la santé. Dans une étude parue le 28 juillet, dans la revue spécialisée Environmental Science & Technology, ils précisent les niveaux d’exposition à risque.
Des combinaisons chimiques toxiques
"Pensez à l'odeur persistante que vous avez probablement déjà sentie en manipulant les vêtements d'une personne qui fume un paquet par jour ou en pénétrant dans une chambre d'hôtel bien propre, mais qui accepte les fumeurs", détaillent les auteurs dans un communiqué. Les surfaces intérieures absorbent les composés de la cigarette, or la nicotine peut interagir avec une substance présente dans l’air intérieur : l’acide nitreux (HNO2). La combinaison des deux forme un autre type de composé, les nitrosamines spécifiques au tabac (TSNA), qui sont fortement cancérigènes. "La nicotine accumulée sur les surfaces domestiques peut générer en continu des TSNA, longtemps après que la fumée ait évacué la pièce", expliquent les scientifiques. Or les seuils peuvent dépasser les taux de risque déterminés par l'État de Californie, ce qui signifie que les non-fumeurs peuvent être exposés à des risques pour la santé en vivant dans des espaces contaminés.
Des substances persistantes
Les auteurs de l’étude se sont intéressés à l’exposition aux TSNA par différentes voies : ingestion, inhalation mais aussi par voie cutanée. "Les expositions cutanées peuvent se produire directement par contact avec de l'air pollué ou une surface contaminée abritant des TSNA - par exemple, en dormant sur des draps enfumés, précisent-ils. Mais ils peuvent également se produire via la chimie épidermique, lorsque la nicotine déjà déposée sur la peau réagit avec le HNO2 environnemental pour former des TSNA directement à la surface du corps."
Pour comprendre ce processus, ils ont réalisé des essais sur la peau de souris. Les scientifiques américains ont constaté que deux TSNA, appelés NNK et NNN, persistent longtemps dans l’organisme. "Dans les conditions expérimentales utilisées, l'analyse des métabolites dans l'urine de souris a montré que, pour les deux composés, le contact cutané direct entraînait l'accumulation et la circulation dans le corps pendant sept jours après l'arrêt de l'exposition cutanée."
Un risque élevé de cancer
Bo Hang, co-auteur de l’étude, note que le contact avec le NNA a entraîné des dommages à l'ADN, y compris des cassures double brin, "le résultat génotoxique le plus délétère". Selon leurs conclusions, ces expositions cumulatives, par inhalation, voie cutanée et ingestion, peuvent contribuer à un risque élevé de cancer. Pour se protéger, il est donc primordial de s'éloigner de la fumée de cigarette.