Le dépistage de l’infection par le VIH n’a vraiment rien d’automatique en France. Un article du Bulletin épidémiologique hebdomadaire montre en effet que par rapport à 2010, la hausse du nombre de tests réalisés n’est que de 5%. Quelque 5,24 millions de sérologies (tests sanguins) de dépistage du VIH ont été réalisées en 2012, ce qui correspond à 80 tests pour 1000 habitants, réalisés pour ¾ dans les laboratoires d’analyses en ville et ¼ à l’hôpital. En moyenne, 2 tests sur 1000 se sont révélés positifs avec des proportions plus élevées en Ile-de-France (3,9/1000), en Guadeloupe (4,5/1000) et en Guyane (8,5/1000).
Le dépistage généralisé ne convainc pas
Ces chiffres « laissent penser que la recommandation de proposer le dépistage du VIH à l’ensemble de la population n’a pas été appliquée largement », écrivent les auteurs. Depuis novembre 2010 et le plan national de lutte contre le VIH/Sida 2010-2014, il est recommandé aux médecins de proposer le dépistage du VIH à l’ensemble de la population, hommes et femmes, homos et hétéros, jeunes et moins jeunes… Les médecins généralistes n’avaient en effet pas vraiment manifesté d’enthousiasme à l’idée de devoir aborder la question des infections sexuellement transmissibles avec l’ensemble de leurs patients.
Un rapport d’experts du Conseil national du Sida remis fin septembre à la ministre de la santé préconise désormais des recommandations de dépistage plus ciblées pour recueillir plus d’adhésion des professionnels de santé. Le dépistage devrait donc être proposé systématiquement lorsque des arguments médicaux comme un zona, une pneumopathie, une infection sexuellement transmissible, une fatigue importante ou encore une perte de poids inexpliquée laissent penser à une infection par le VIH. Par ailleurs, face à un patient n’ayant pas eu récemment de test de dépistage, toutes les opportunités doivent être saisies par le médecin pour lui proposer le dépistage : une consultation avec un nouveau patient, un check-up, un motif gynécologique (frottis, demande de contraception, désir de grossesse, retard de fécondité), une consultation de préparation d’un voyage, l’évocation d’une rupture sentimentale … L’objectif de banalisation du test de dépistage n'est manifestement pas atteint, ni chez les médecins, ni chez les patients.
L'atout test rapide
L’article du BEH note, en revanche, des progrès en matière de dépistage dans les populations à risque. Près de 32 000 tests rapides d’orientation diagnostique (TROD), qui permettent de déceler le virus en quelques minutes à partir d'une goutte de sang prélevée au niveau du doigt, ont été réalisés en milieu associatif en 2012. Ils ont concerné plutôt des hommes homosexuels (40%), des migrants (30%), des usagers de drogues (7%) et des prostitué(e)s (2%). Près d’un tiers de ces personnes n’avaient jamais fait de dépistage dans leur vie. Dans ces populations à risque, le taux de positivité est beaucoup plus élevé qu’en population générale, on compte 10,5 séropositivités découvertes pour 1000 personnes dépistées.
D’ici peu, un autre outil pourrait venir changer la donne en matière de dépistage du VIH. Les auto-tests, réalisables à domicile à partir d’un échantillon de salive, sont annoncés en France d'ici début 2014.
Tous ces outils devraient permettre de circonscrire ce que les spécialistes appellent l’épidémie silencieuse : près de 30 000 personnes vivent en France avec le virus du Sida sans le savoir et seraient responsables de 60% des nouvelles contaminations. Ignorer sa séropositivité a des conséquences importantes sur sa propre santé et contribue au maintien d'une épidémie de Sida active en France, où le nombre de nouvelles contaminations est de plus de 6000 par an et ne baisse pas.