Les enfants sont moins naïfs qu’on ne le croit. "La recherche montre qu'à mesure que les enfants vieillissent, ils deviennent plus sceptiques quant à ce que les adultes leur disent", explique dans un communiqué Samantha Cottrell, chercheuse à l'université de Toronto et auteure principale d’une nouvelle étude publiée dans la revue Child Development. Elle y démontre comment les enfants commencent avec l’âge à apprendre par eux-mêmes, par l'observation et l'expérimentation, en recherchant des informations supplémentaires, en posant des questions ou en testant des affirmations.
6 ans, un âge charnière vers le doute
Une première étude a porté sur des enfants canadiens âgés de 4 à 6 ans à qui on a présenté trois objets familiers : une pierre, un morceau de matériau semblable à une éponge et un footbag (ou hacky sack), une petite balle en cuir ou en fibre synthétique rempli de billes de polyéthylène ou de sable. Un expérimentateur a commencé par demander aux enfants s'ils pensaient que la roche était dure ou molle. Naturellement, tous ont convenu que la roche était dure. Les chercheurs ont ensuite affirmé à certains d’entre eux que la roche était en fait molle, tandis qu’ils ont confirmé à d’autres qu'elle était bien dure.
Presque tous ceux qui ont entendu des affirmations conformes à leurs croyances ont continué à porter le même jugement qu'auparavant. En revanche, peu d'enfants à qui on avait dit que la roche était molle ont commencé à changer d’avis et penser qu’elle était en fait molle. L'expérimentateur a ensuite dit aux enfants qu'il devait quitter la pièce pour passer un coup de fil, permettant ainsi aux enfants d'explorer l'objet par eux-mêmes. Les enregistrements vidéo ont montré que les enfants les plus impliqués dans l’exploration de l’objet étaient ceux à qui on avait dit que la roche était molle, quel que soit leur âge.
Dans une deuxième étude, 154 enfants âgés de 4 à 7 ans du même quartier ont reçu huit vignettes sur l’application Zoom. Pour chacun d’entre eux, on leur a dit que l'adulte avait fait une affirmation surprenante telle que "la roche est molle" ou "l'éponge est plus dure que la roche". On leur a demandé ce qu'un autre enfant devrait faire en réponse à cette affirmation et pourquoi ils devraient le faire.
"Il y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas"
Les résultats ont indiqué que les enfants de 6 et 7 ans étaient plus susceptibles de proposer une stratégie d'exploration adaptée à l’affirmation entendue précédemment que les enfants plus jeunes. Par exemple, toucher le rocher dans le premier exemple et toucher le rocher et l'éponge à la suite dans le second. Les chercheurs expliquent qu'avec l'âge, les enfants justifient de plus en plus l'exploration comme moyen de vérifier l'affirmation surprenante de l'adulte.
Les résultats suggèrent donc qu'à mesure que les enfants vieillissent, ils deviennent plus conscients de leurs doutes sur ce que les adultes leur disent. En conséquence, leurs explorations pour vérifier leurs dires deviennent plus intentionnelles, ciblées et efficaces.
"Il y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas. Mais ce qui est clair, c'est que les enfants ne croient pas tout ce qu'on leur dit" a déclaré un co-auteur de l’étude, Samuel Ronfard. "Ils réfléchissent à ce qu'on leur a dit et s'ils sont sceptiques, ils recherchent des informations supplémentaires qui pourraient le confirmer ou l'infirmer."