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Recherche médicale

Ocytocine : comment "l’hormone de l'amour" pourrait soigner le cœur

Par Rafaël Andraud

Des chercheurs ont découvert que l'ocytocine, souvent appelée "l'hormone de l'amour", pourrait être une piste prometteuse pour développer un nouveau traitement afin de régénérer le cœur des patients souffrant de crise cardiaque.

olando_o/iStock
L’ocytocine est un neuropeptide (type d’hormone) produit par l'hypothalamus dans le cerveau. Il est connu pour encourager les liens sociaux, favoriser l’attachement et générer des sensations agréables, par exemple à partir du sexe, de l’amour, de l’exercice physique ou de l’art.
Mais l'hormone a de nombreuses autres fonctions, telles que la régulation de l'éjaculation et de la production de testostérone chez les hommes et la régulation de la lactation et des contractions utérines chez les femmes.
À propos du sexe, l'ocytocine stimule les érections et les orgasmes. Chez les femmes, on pense qu'il aide les spermatozoïdes à atteindre l'ovule. Des quantités anormales d’ocytocine ont un lien avec la dépendance sexuelle.

L'ocytocine, l’hormone libérée pendant les rapports sexuels et associée à l’attachement chez l’humain, pourrait un jour être utilisée pour favoriser la régénération du cœur humain après une crise cardiaque. C’est ce que révèle une nouvelle étude, publiée dans la revue Frontiers in Cell and Developmental Biology. Selon les chercheurs de la Michigan State University, "l'hormone de l'amour" pourrait permettre de stimuler la production de cellules souches dans le cœur. Les résultats sont basés à la fois sur des tests réalisés sur des cellules humaines cultivées en laboratoire et des expériences sur les poissons zèbres, qui ont une remarquable capacité à s’autoréparer.

"Nous montrons ici que l'ocytocine est capable d'activer les mécanismes de réparation cardiaque dans les cœurs blessés chez le poisson zèbre et les cultures de cellules humaines, ouvrant la porte à de nouvelles thérapies potentielles pour la régénération cardiaque chez l'homme", a déclaré l'auteur principal, le Dr Aitor Aguirre, professeur adjoint au Département de génie biomédical de l'Université d'État du Michigan, dans un communiqué.

Comment l'ocytocine guérit-elle le cœur ?

L'équipe de recherche rapporte que la stimulation provoquée par l'ocytocine provoque une migration des cellules souches de la couche externe du cœur, ou épicarde, vers la couche du milieu, le myocarde. Là, ces cellules souches se transforment en cardiomyocytes, des cellules musculaires qui permettent les contractions cardiaques. Or, après une crise cardiaque, les cellules du cœur meurent en grand nombre, notamment les cardiomyocytes. Comme ce sont des cellules hautement spécialisées, elles ne peuvent pas se reconstituer.

Cependant, de précédentes études ont montré qu'un sous-ensemble de cellules souches appelées par les chercheurs anglophones "EpiPC" (cellules dérivées épicardiques primaires) peuvent être reprogrammées pour se transformer en cardiomyocytes ou en des autres types de cellules cardiaques. Ces EpiPC pourraient donc remplacer les cellules mortes essentielles au bon fonctionnement du cœur, grâce à l’ocytocine qui les stimule. "Pensez aux EpiPC comme aux tailleurs de pierre qui ont réparé les cathédrales en Europe au Moyen Âge", explique le Dr Aguirre. Seule l’ocytocine, sur les 14 autres hormones cérébrales testées en laboratoire, a provoqué un tel effet.

L'hormone de l'amour permet au poisson zèbre de faire repousser son cœur 

Mais pourquoi le poisson zèbre est-il aussi central dans cette nouvelle recherche ? Il pourrait en fait détenir la clé de la régénération cellulaire. Ils sont en effet connus pour leurs capacités extraordinaires de régénération de leurs organes : le cerveau, la rétine, les organes internes, les os et la peau. Surtout, le poisson zèbre peut faire repousser jusqu’à un quart de son cœur quand il en a perdu une partie à cause d’un prédateur. Cela est rendu possible par la production d’un très grand nombre de cardiomyocytes et d’EpiPC, grâce à la stimulation provoquée par l’ocytocine. Les nouvelles cellules se dirigent vers le myocarde du poisson zèbre pour se développer en cardiomyocytes et autres cellules cardiaques importantes, afin de remplacer celles qui sont perdues. Après cette première découverte, les auteurs de l'étude ont constaté que l'ocytocine avait un effet similaire sur des cellules souches humaines cultivées en laboratoire.

Les chercheurs ont tout de même souligné que de nouveaux essais cliniques chez l’animal et chez l'humain étaient encore nécessaires pour avancer sur cette piste prometteuse.