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Mémoire

Comment le sommeil favorise-t-il nos souvenirs ?

Par Stanislas Deve

Durant le sommeil, une région du cerveau "apprend" à une autre les nouvelles informations acquises au cours de la journée, consolidant ainsi la mémoire des souvenirs à long terme. Explications.

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Une "bonne nuit", selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, c’est entre 4 et 6 cycles successifs de 90 minutes en moyenne. Chaque cycle est lui-même constitué de trois phases distinctes : le sommeil lent léger (50 % du temps), le sommeil lent profond (20-25 %) et le sommeil paradoxal (20-25%).
Il existe plusieurs types de mémoire : la mémoire spatiale, perceptive (les cinq sens), épisodique (les souvenirs), sémantique (la connaissance pure), procédurale (les automatismes comme savoir marcher, écrire, conduire...), la mémoire à court et à long terme, la mémoire musculaire... Chacune affecte une ou plusieurs zones du cerveau simultanément.

Quel rôle joue le sommeil dans la création des souvenirs ? "Nous savons depuis longtemps qu'un apprentissage utile se fait pendant le sommeil", confie Anna Schapiro, neuroscientifique à l'université de Pennsylvanie, aux Etats-Unis. "Vous encodez de nouvelles expériences pendant que vous êtes éveillé, vous vous endormez et lorsque vous vous réveillez, votre mémoire a été en quelque sorte transformée." Mais comment ? Une nouvelle étude, menée par la chercheuse et son équipe, lève un peu plus le voile sur ce processus.

La mémoire se consolide entre les sommeils profond et paradoxal

Dans le cadre de leurs travaux, publiés dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences, les scientifiques ont d’abord construit un modèle informatique de réseau neuronal composé d’un hippocampe, le centre du cerveau en charge des nouvelles informations épisodiques, et d’un néocortex, impliqué dans des fonctions essentielles comme le langage, la cognition et le stockage de la mémoire. Plusieurs simulations de sommeil ont ensuite été effectuées à l’aide d’un algorithme.

En analysant les schémas d’activité cérébrale en fonction des cycles de sommeil, les chercheurs ont constaté que lorsque notre cerveau passe du sommeil profond (à ondes lentes) au sommeil paradoxal - soit environ cinq fois par nuit -, l’hippocampe "enseigne" au néocortex ce qu’il a appris, transformant ainsi des souvenirs nouveaux et éphémères en mémoire durable. Concrètement, pendant le sommeil lent et profond, le cerveau, guidé par l’hippocampe, revisite les informations récemment acquises, et durant le sommeil paradoxal, le cerveau, guidé par le néocortex, repasse le "film" de ces informations qu’il connaît déjà, pour en faire des souvenirs bien ancrés, avant de les stocker.

L’importance des phases du sommeil pour la mémoire

L'alternance entre les deux phases du sommeil est cruciale, assure le neuroscientifique Dhairyya Singh, co-auteur de l’étude, dans un communiqué. "Lorsque le néocortex n'a pas la possibilité de rejouer ses propres informations [par exemple lorsque nous brisons un cycle de sommeil avant sa fin, ndlr], nous constatons que les informations y sont écrasées. Nous pensons donc que vous devez alterner sommeil paradoxal et non-paradoxal pour que la mémoire se forme durablement."

À long terme, les chercheurs espèrent qu’une meilleure compréhension du rôle des stades du sommeil sur la mémoire pourrait aider à développer de nouveaux traitements contre les troubles psychiatriques et neurologiques, dont les problèmes de sommeil sont un symptôme.