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Le bruit empoisonne notre vie quotidienne

Par Mathias Germain

Le bruit n'altère pas seulement les oreilles, il nuit à la qualité du sommeil, à la santé du coeur et du cerveau, rappellent des chercheurs américains.

LANCELOT FREDERIC/SIPA

« Des casques audio qui font exploser les basses lors d’un trajet en métro, au bourdonnement incessant du trafic pour ceux qui vivent ou travaillent à coté d’axes routiers saturés jusqu’aux bips des moniteurs qui font la bande son des hôpitaux, tout ce que nous entendons au quotidien à un impact sur la santé ! », clame le Dr Mathias Basner, spécialiste du sommeil et de chronobiologie au Département de psychiatrie de Penn (Philadelphie).
Avec d’autres chercheurs, il a passé en revue toutes les études qui ont évalué les effets nocifs du bruit sur la santé. L'équipe s'est concentrée sur les études publiées au cours des cinq dernières années dans les domaines de l'ORL, la médecine cardiovasculaire, la médecine du sommeil, la psychologie et la médecine hospitalière.

Une altération de l'oreille à 85 décibels
« Environ 22 millions de travailleurs américains sont exposés à des niveaux sonores dangereux au travail. Chaque année, un montant estimé à 242 millions de dollars est consacré à la compensation pour perte de déficience auditive », releve e Dr Basner.
Le médecin souligne que des efforts éducatifs supplémentaires doivent être prévus afin de prévenir les effets du bruit. Si ce dernier devient douloureux à partir de 120 décibels, il ne faut pas oublier qu’il altère l’oreille dès une exposition à 85 décibels, soit le niveau de bruit d'un camion roulant à 50 km/h à 20 mètres…

Des travaux sur le bruit social 
Les auteurs de cette revue de la littérature scientifique publiée dans The Lancet ont relevé qu’au cours des dernières années, la recherche s'est élargie pour se concentrer sur le bruit social, tels que le bruit entendu dans les bars, le bruit du trafic routier, le rail et mais aussi la circulation de l'air. Les scientifiques ont trouvé des preuves que l'exposition à long terme au bruit ambiant affecte le système cardiovasculaire, avec des associations à l'hypertension, aux cardiopathies ischémiques et aux accidents vaculaires cérébraux.
Ainsi, une étude menée pendant dix ans au Danemark, auprès de 50 000 personnes a montré que l’exposition au bruit du trafic routier accentue les risques d’AVC, particulièrement chez les personnes de plus de 65 ans, avec un surrisque de 14 % par pallier de 10 dB…


En outre, de nombreuses études ont souligné les associations entre l'exposition environnementale au bruit et les troubles du sommeil, le développement cognitif des enfants et même des effets négatifs dans les hôpitaux pour les patients et le personnel. D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre d’années de vie en bonne santé perdu en Europe est de 61 000 pour cause de crise cardiaque liée à une exposition au bruit, et de 587 000 pour cause de gêne due au bruit.

Deux Français sur trois se plaignent du bruit
Au regard de ces différentes données, les auteurs américains plaident en faveur d’une action publique plus forte pour limiter les nuisances sonores et faire de la prévention auprès des populations. En France, l’Académie de médecine a publié en juin 2012 un rapport sur les nuisances sonores de voisinage dans l’habitat. Elle rappelait que deux Français sur trois se plaignent du bruit à leur domicile au point que 15 % pensent à déménager. L'Académie proposait aussi la création d'offices du bruit, comme à Toulouse, qui propose une écoute et une possibilité de médiation aux locataires affectés par le vacarme de leurs voisins.