D’après les études 2022, intéressantes ou marginales, pouvez-vous nous dire si les traitements hormonaux augmentent le risque de cancers du sein ?
Les vieux traitements hormonaux, je parle là des traitements substitutifs que l’on donne aux femmes ménopausées pour diminuer, entre autres, l’ostéoporose, ont pu être associés à une augmentation de l’ordre de 20 % du risque de cancer du sein. Cette association n’est pas retrouvée avec des traitements hormonaux plus modernes.
Alors, il faut se garder de deux choses. La première est de dire, comme il y a une trentaine d’années sur les plateaux de télévision, que toutes les femmes ménopausées devaient bénéficier de tous les traitements hormonaux et que c’était miraculeux, extraordinaire. Et à l’opposé, dire aujourd’hui qu’il ne faut plus du tout les prescrire. Il y a incontestablement des symptômes qui s’améliorent beaucoup et en particulier les horribles bouffées de chaleur que vivent certaines femmes ménopausées. Il faut surtout discuter avec son gynécologue.
"C’est une consommation d’alcool excessive qui augmente beaucoup le risque"
Trop peu de femmes savent que l’alcool augmente le risque de cancer du sein ?
L’alcool augmente le risque de beaucoup de maladies cancéreuses. Ne soyons pas puritains, c’est une consommation d’alcool excessive qui augmente beaucoup le risque. La consommation modérée et raisonnable, si possible pas tous les jours, reste quand même assez sécurisée dans un pays où c’est la tradition.
Le travail de nuit peut-il faire le lit des cancers ?
ll y a plusieurs études qui le montrent. Mais il y a une étude française, plus récente, qui nous vient de l’Inserm et qui suggère que le travail de nuit pourrait être associée à une augmentation de l’ordre de 40 % de la survenue de cancers en général, du cancer du sein en particulier. Et surtout si le travail de nuit a duré plus de quatre ans et surtout s’il y avait au moins trois nuits par semaine et quand il y a des alternances, travail de jour, travail de nuit, etc. C’est un rationnel biologique. Les cycles de sommeil sont régulés par la mélatonine. Cette hormone a un rythme “chronomodulé”, et si vous travaillez la nuit, vous supprimez les pics de mélatonine. Or, la mélatonine a un effet antioxydant très puissant qui est considéré, par certains, comme un effet préventif sur le cancer.
Soyons tout de même très prudents parce qu’association ne signifie pas toujours causalité. Il est possible aussi, par exemple, que vous ayez des personnels de nuit qui fument davantage que les personnels qui travaillent de jour. Ce serait ce que l’on appelle un facteur confondant. Le travail de nuit doit probablement être évité ou minimisé autant que possible. Faisons preuve de discernement et de bon sens !
Les perturbateurs endocriniens peuvent jouer un rôle dans la survenue de cancers
Il y a également une étude de chez vous, à Lyon, qui dit que la pollution serait responsable du cancer du sein ?
Nous avons à Lyon, et ça depuis le Général de Gaulle, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), dont c’est le travail d’identifier ce que l’on appelle des carcinogènes, notamment dans l’environnement. Ils font des études très sophistiquées et ce n’est pas simple mais effectivement les polluants environnementaux jouent un rôle et en particulier les hydrocarbures et les molécules qui modifient l’environnement sur le plan endocrinologique, ce que l’on appelle des perturbateurs endocriniens, peuvent en effet jouer un rôle dans la survenu de cancers.
Tout d’abord, il est bien clair que cela n’a rien à voir avec le tabac et l’alcool. Inutile de se préoccuper de la pollution si on fume deux paquets de cigarettes par jour. Pour beaucoup de polluants environnementaux, la situation s’est améliorée depuis un siècle. Il y a beaucoup moins de certains polluants comme le dioxyde de soufre dans l’atmosphère. Et il y a moins d’hydrocarbures parce qu’au début du siècle dernier, on se chauffait au charbon et au bois et dans les villes, c’était de véritables braseros. Aujourd’hui, l’air est en réalité beaucoup plus pur. Ayons un peu d’optimisme !
Vous pouvez retrouver l’interview en images ici :