Wikipedia ne serait pas un bon docteur. C'est ce que révèle une méta-analyse réalisée par l'Université Laval (Canada) et publiée dans le Journal of Medical Internet.
Un contenu pas fiable et à ne pas utiliser
Quant aux 25 études qui ont porté sur la qualité de l'information – dont 24 ciblaient Wikipédia –, leurs conclusions montrent que le docteur Wiki n'est pas omniscient. 44 % de ces études jugent que les informations sur la santé véhiculées par les wikis sont partiellement fiables et doivent être améliorées, alors que 28% concluent que leur contenu n'est pas fiable et ne doit pas être utilisé. L'absence de modérateur expert contribue au joyeux mélange de bon grain et d'ivraie trouvé dans plusieurs sites collaboratifs.
Une utilisation intensive des étudiants en médecine
Cette équipe canadienne a passé en revue 111 études consacrées à des wikis renfermant des informations sur la santé. Les wikis sont des applications Web qui permettent à un groupe d'usagers de créer et de modifier des contenus afin de partager leurs connaissances et leurs expériences, ou encore d'obtenir de l'information sur un sujet donné.
L'archétype des wikis est Wikipédia, qui vient au sixième rang mondial dans la liste des sites Web les plus consultés. D'après les observations du Pr Patrick Archambault, plus de 50 % des médecins et des étudiants universitaires en sciences de la santé ont recours aux wikis. Mais les professionnels de la santé ne sont pas en reste puisque 55 % consultent également ces sites. En revanche, rares sont ceux qui créent ou modifient le contenu de pages wiki. Cette participation ne dépasse pas 18 % chez les jeunes étudiants et elle est de moins de 1% chez les chercheurs.
Un potentiel à exploiter
Malgré ces faiblesses, le Pr Archambault croit fermement au potentiel des wikis en santé. «En médecine, il existe présentement un important problème de mise en application des connaissances issues de la recherche, souligne-t-il. Les meilleures données probantes ne sont pas utilisées et les patients ne reçoivent pas toujours les traitements les plus appropriés. Comme la planète consulte déjà Wikipédia pour trouver de l'information médicale – on parle de 150 millions de téléchargements par mois dans ce domaine –, il faut utiliser la puissance de cet outil et en améliorer la qualité en faisant participer plus de médecins et de professionnels de la santé à l'élaboration du contenu.»
Un groupe d'experts médicaux s'est attelé à cette tâche en créant le WikiProject Medicine, poursuit le chercheur. Ce groupe vient de conclure une entente avec la collaboration Cochrane, un phare en médecine pour la fiabilité des données scientifiques, afin d'augmenter le nombre de résumés vulgarisés dans Wikipédia. Il existe aussi un partenariat entre Wikipédia et la PubMed Health des National Institutes of Health des États-Unis pour accroître le nombre de revues d'études scientifiques dans ses pages. «Il faudra trouver des incitatifs pour encourager les professionnels de la santé à transmettre leur expertise ainsi que des façons d'intégrer cette transmission de connaissances à leur travail quotidien sans les surcharger, précise Patrick Archambault. Si nous y arrivons, nous verrons un changement radical dans la production et l'application des connaissances en santé, pour le plus grand bien de nos patients.»