La sérotonine intervient sur le développement de la peur et de l'anxiété. Des scientifiques de l'université de la Ruhr à Bochum (Allemagne) ont cherché à comprendre le rôle de ce neurotransmetteur dans l'apprentissage par extinction, c'est-à-dire le "désapprentissage de la peur".
Sérotonine et peur : des travaux menés sur des souris
Afin de mieux comprendre le lien entre le neurotransmetteur et la peur, les chercheurs ont examiné des souris modifiées génétiquement qui n'ont pas un récepteur de la sérotonine appelé récepteur 5-HT2C.
Ces dernières ont appris en une journée à associer un certain son à un stimulus électrique léger, mais désagréable. "À la suite de ce processus d'apprentissage, le jour suivant, elles ont montré une réaction de peur qui se caractérisait par une pause immobile dès que le son était joué, ce que nous appelons le « gel »", explique Katharina Spoida du Département de zoologie générale et de neurobiologie de l’université allemande.
L'étape suivante consistait à jouer à plusieurs reprises le bruit sans la stimulation électrique. "Fait intéressant, nous avons remarqué que les souris knock-out (modifiée génétique, NDLR) apprenaient beaucoup plus rapidement que le son ne prédit pas le stimulus de peur que les souris dépourvues de cette modification génétique spécifique", explique l'experte. "Par conséquent, il semble que l'absence du récepteur de la sérotonine offre un avantage pour l'apprentissage de l'extinction.", poursuit-elle dans son article.
Absence du récepteur à sérotonine : 2 zones du cerveau affectées
Par ailleurs, les animaux ne disposant pas de récepteurs à sérotonine 5-HT2C, présentaient des changements dans leur activité neuronale dans deux zones cérébrales différentes :
- une sous-région spécifique du noyau du raphé dorsal (DRN) : elle est généralement le principal site de production de sérotonine dans le cerveau ;
- le noyau du lit de la stria terminalis (BNST) : cette zone joue un rôle central dans l'expression de l'anxiété.
"Chez les souris knock-out, nous avons d'abord trouvé une activité basale accrue dans certaines cellules productrices de sérotonine des noyaux du raphé dorsal. Dans une étape ultérieure, nous avons montré que l'absence du récepteur modifie également l'activité neuronale dans deux sous-noyaux du BNST, ce qui soutient finalement l'apprentissage par extinction", confirme la scientifique Sandra Süß qui dirige aussi les travaux.
Les résultats de la recherche indiquent aussi un lien entre les deux régions du cerveau, ce qui conduit les scientifiques à supposer qu'une interaction est importante pour améliorer l'apprentissage par extinction.
Une découverte utile pour le traitement des troubles de stress post-traumatique
"Il existe déjà des médicaments en usage clinique qui régulent la quantité de sérotonine disponible, appelés inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS)", souligne Katharina Spoida.
"La prise de ces médicaments sur une période prolongée rend le récepteur concerné moins réactif à la sérotonine, comme dans notre modèle knock-out. Par conséquent, nous supposons que les changements que nous avons décrits pourraient être essentiels pour l'effet positif des ISRS", ajoute sa collègue Sandra Süß.
Selon les chercheuses, leurs travaux pourraient aider à développer des traitements plus ciblées pour les patients atteints de trouble de stress post-traumatique.