Il y a des pathologies que l’on croît bien connaître et on s'aperçoit quand on travaille dessus qu'elles ne sont pas telles qu'elles paraissent être. Et il semble que cela soit le cas du foramen ovale perméable. Vous nous rappeler ce que c'est, quel est son risque et quelle est sa fréquence réelle ?
Le foramen ovale renvoie à la structure qui sépare l'oreillette gauche de l'oreille droite du cœur. Mais cette structure n’est pas quelque chose de figé ou de solide. En fait, ce sont deux parois souples qui sont accolées l'une à l'autre et dans certaines circonstances, ces deux parois peuvent ne pas être strictement accolées, ce qui crée une espèce de cavité entre elles qui permet un passage théorique entre l'oreille gauche et l'oreillette droite.
Foramen ovale perméable : 1/4 de la population aurait cette malformation cardiaque
C'est une malformation cardiaque qui est extrêmement fréquente puisque certaines études disent qu'elle serait là jusqu'à chez un quart de la population. Cela peut malheureusement se compliquer parfois parce que ce passage entre les cavités gauches et les cavités droites peut laisser passer des caillots de sang qui peuvent venir du secteur veineux (donc du secteur droit pour aller dans le réseau gauche), pouvant parfois provoquer des accidents vasculaires cérébraux.
Heureusement, c'est très rare, ça ne touche pas les 25 % de patients avec un foramen ovale ouvert parce qu'il y a des formes qui sont plus ou moins sévères que d'autres. Mais quand ça arrive, il faut traiter ce foramen ovale perméable en le fermant. C’est une procédure que l’on peut faire à la Pitié-Salpêtrière : on met en place des prothèses de façon percutanée afin de fermer définitivement ce foramen ovale perméable. Ce n'est pas une chirurgie cardiaque, c'est une intervention assez simple qui dure une demi- heure à peu près. Les patients peuvent être endormis ou non car cela peut être fait sous sédation légère. Et donc ça permet avec cette prothèse, de fermer définitivement ce foramen ovale perméable.
Quel est le rapport entre la fermeture du foramen ovale et la fibrillation atriale ?
Ce qu'on a pu mettre en évidence à la Pitié-Salpêtrière, c'est que le fait de fermer ce foramen ovale perméable par ces prothèses peut déclencher des arythmies cardiaques, principalement de la fibrillation auriculaire. Alors, c'était connu, on savait que ça pouvait déclencher de la fibrillation auriculaire, mais les taux qui étaient classiquement rapportés dans la littérature étaient assez faibles. C'était de l'ordre de 3 à 7 % des patients après l'intervention, donc relativement faible.
À la Pitié-Salpêtrière, on a une approche un peu plus innovante en ayant recours systématiquement à des méthodes de dépistage, de monitoring, de surveillance du rythme cardiaque dans les semaines qui suivent l'intervention. Concrètement après la procédure de fermeture cutanée du foramen ovale perméable, on fait sortir nos patients soit avec un dispositif portable qui monitore le rythme cardiaque pendant 28 jours, soit avec un dispositif sous-cutané qui peut monitorer le rythme cardiaque jusqu'à trois ans.
Grâce à cette approche assez généraliste chez tous les patients, on a mis en évidence des taux d'arythmie qui étaient 3 à 5 fois supérieurs à ce qui était classiquement décrit et qui, en l'occurrence, était de 21 % dans les 28 jours. Alors, je veux rassurer les patients qui doivent bénéficier de ce genre d'intervention à la Pitié-Salpêtrière, ce n’est pas si grave, c'est tout à fait gérable avec des médicaments. Mais c'est quelque chose qu'on est heureux de connaître et de pouvoir diagnostiquer.
Fibrillation atriale : "on met généralement en place un traitement anticoagulant"
Cela signifie que vous mettez en place des traitements anticoagulant dans le suivi des procédures de fermeture du foramen ovale ?
Alors, si on dépiste une arythmie cardiaque grâce à notre approche, en effet, on met généralement en place un traitement anticoagulant. Donc c'est un peu au cas par cas. On essaie de faire le plus court possible pour que ce soit le moins gênant pour les patients. Généralement, cela dure quelques mois et on met en place, si c'est symptomatique, un traitement antiarythmique pendant quelques semaines. On pense en fait que l'arythmie cardiaque qui survient après cette fermeture de prothèse est liée à un phénomène d'irritation suite à la mise en place de la prothèse. Mais avec les semaines qui passent, le cœur cicatrise et donc le phénomène finit par disparaître dans la quasi-totalité des cas au bout de quelques mois. Donc, le message c'est que ce n'est pas une complication grave qui justifierait de ne pas faire cette intervention. Mais c'est un élément qu'il faut savoir diagnostiquer pour pouvoir mieux traiter le patient durant la période de survie.
L'étape d'après maintenant, c'est un projet de recherche qu'on a pu lancer avec Action-Cœur où on essaie de traiter d'emblée les patients qui bénéficient de ce type d'intervention avec un traitement anti-arythmique. L’idée n’est plus d'être spectateur, d'attendre que le problème arrive pour le traiter, mais d'essayer d'être proactif et de prévenir la complication avec un traitement anti-arythmique transitoire.